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L'empereur Wilhelm II s'établit en exil aux
Pays-Bas.
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Le chancelier Friedrich Ebert (SPD) propose à l'USPD que soit "formé un cabinet composé à parts égales
de [socialistes] majoritaires et indépendants, qui pourrait être assisté
par des membres des partis bourgeois de la gauche, en tant que ministres
spécialisés"[1].
Il ne pose pas de conditions quant aux personnes, il n'est pas opposé à
l'entrée au gouvernement de Karl Liebknecht. Le 9 novembre, l'USPD avait formulé des conditions en vue d'une éventuelle
participation au gouvernement (cf. à cette date). Sous l'influence d'Hugo
Haase, l'USPD renonce à ces exigences, refusées par le
SPD. Selon la formule de compromis, "le pouvoir politique est entre
les mains des conseils d'ouvriers et de soldats, qu'il faut convoquer sous
peu à une assemblée plénière en provenance du pays [Reich] entier."
(Lettre du 10 novembre de l'USPD au MSPD, cf. ci-dessous.)
Le gouvernement ainsi constitué sous la dénomination de
“Conseil des mandatés du peuple” [“Rat der Volksbeauftragten”]
est composé de la manière suivante: F. Ebert (SPD) (Intérieur et
militaire), Philipp Scheidemann (SPD) (Finances), Otto Landsberg (SPD) (Presse, art et littérature), Hugo
Haase (USPD) (Affaires étrangères et colonies), Wilhelm Dittmann (USPD)
(Démobilisation, transports et justice), Emil Barth (USPD)
(Politique sociale).
Pour ce qui est du terme “Conseil des mandatés du peuple”,
il faut noter que durant la période d'existence de cet organe, le
vocabulaire ne sera pas respecté rigoureusement[2].
Au sein de l'administration, sera utilisé la plupart du temps le terme
“cabinet”, y compris par ses membres, et Friedrich Ebert sera désigné comme
le “chancelier du Reich”, titre qui apparaitra même parfois dans des
publications officielles. Dans les communiqués et décrets, coexistent
“conseil des mandatés du peuple” et “gouvernement du Reich”. Le
30 décembre, après la démission des membres appartenant à l'USPD survenue la veille, le cabinet adoptera une décision
que les décrets ayant force de loi seront "édictés dans l'avenir non
plus par le conseil des mandatés du peuple, mais par le gouvernement du
Reich" ["künftig nicht mehr vom Rat der
Volksbeauftragten, sondern von der Reichsregierung erlassen"].
Néanmoins le terme “conseil des mandatés du peuple” apparaitra encore
occasionnellement, la dernière fois le 14 janvier 1919, et pour les
membres, le titre “mandaté du peuple” subsistera durant toute la période de
gouvernement de transition.
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Par ailleurs se tient l'assemblée plénière des conseils
d'ouvriers et soldats de Berlin qui avait été convoquée la veille,
afin d'élire un “conseil exécutif du conseil d'ouvriers et de soldats
Grand-Berlin” [“Vollzugsrat des Arbeiter-und-Soldatenrats
Groß-Berlin”][3].
Il s'agit d'environ 3000 délégués répartis à peu près également entre
ouvriers et soldats. Le SPD fait adopter le principe de la parité,
premièrement entre délégués d'ouvriers et de soldats, deuxièmement entre
délégués du SPD et de l'USPD. Les représentants du
Groupe Spartakus, en désaccord avec ces dispositions, quittent l'assemblée.
À l'issue des négociations, il est décidé que le conseil exécutif soit
composé de 6 membres SPD, 6 USPD, et
12 soldats. Le Conseil des mandatés du peuple est confirmé comme
gouvernement provisoire jusqu'à la tenue d'une assemblée nationale
constituante. Au conseil exécutif est attribué le statut d'instance suprême
investie du pouvoir de contrôle à l'égard du Conseil des mandatés du
peuple.
Les membres du conseil exécutif au titre des conseils
d'ouvriers et venant de l'USPD sont: E. Barth,
Paul Eckert, Georg Ledebour, Richard Müller, Paul Neuendorf et Paul Wegmann[4].
À l'exception de Ledebour tous appartiennent à la
direction des “hommes de confiance”. Dans sa composition finale, le conseil
exécutif comprend 14 délégués ouvriers et 14 délégués soldats. Pour
l'USPD, s'ajoute ainsi Ernst Däumig.
Müller ainsi que le capitaine [Hauptmann] Hans-Georg von
Beerfelde sont nommés présidents. Le 12 novembre, Beerfelde sera remplacé par Brutus Molkenbuhr
(SPD).
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À Dresde (Sachsen) est
constitué, suivant l'initiative de l'USPD, le conseil
d'ouvriers et de soldats unifié de Grand-Dresde, par la fusion des deux
conseils d'ouvriers et de soldats qui avaient été constitués séparément par
le SPD d'un côté, le USPD de l'autre[5].
Y participe entre autre Otto Rühle en tant que
co-président, pour l'USPD, mais il quittera le conseil
le 16 novembre.
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À Braunschweig
(Niedersachsen), au nom du conseil d'ouvriers et de soldats, Sepp Oerter (USPD) proclame la
République de Braunschweig[6].
August Merges (Groupe Spartakus) est désigné comme
président de la république, un Conseil des mandatés du peuple composé
uniquement de membres de l'USPD est formé.
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À Stuttgart (Württemberg), un conseil d'ouvriers et
de soldats est constitué[7].
Le Groupe Spartakus, représenté par Fritz Rück (qui,
après avoir été arrêté quelques jours auparavant, vient d'être libéré) et August Thalheimer, propose de considérer comme illégitime le
gouvernement provisoire présidé par Wilhelm Blos
(SPD), qui avait été formé le 9 novembre[8],
et de créer un conseil général [Generalrat] qui devra
assumer le pouvoir exécutif sous le contrôle du conseil d'ouvriers et de
soldats. La proposition est rejetée, le gouvernement est confirmé. Un
comité d'action [Aktionsausschuß] est constitué qui à
l'exception de Kurt Schiel (SPD) ne comprend que des
membres de l'USPD/Spartakus, dont Rück
et Thalheimer. Ce dernier est désigné comme président
du comité d'action.
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À Kassel (Hessen)
est constitué un conseil d'ouvriers et de soldats sous la présidence d'Albert Grzesinski (SPD) et Richard Hauschildt
(SPD)[9].
Grzesinski sera délégué au congrès national des
conseils d'ouvriers et de soldats qui se tiendra du 16 au
21 décembre, il y sera élu comme membre du “conseil central de la
république socialiste allemande” [“Zentralrat der deutschen
sozialistischen Republik”] nouvellement constitué, fonction qu'il
quittera en juin 1919 lorsqu'il deviendra sous-secrétaire d'État au
ministère de la guerre de Prusse.
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À Potsdam (Brandenburg) est
constitué un conseil d'ouvriers et de soldats sous la présidence de Wilhelm Staab (SPD)[10].
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À Berlin, le Conseil des mandatés du peuple et le
conseil exécutif décident, sur proposition du préfet de police de Berlin
nouvellement nommé, Emil Eichhorn (USPD), de recruter
3600 soldats volontaires, afin de renforcer temporairement la vielle
police (la “Schutzpolizei”, ou “Schutzmannschaft”),
désarmée[11].
Ainsi est constituée la “Garde de sécurité Grand-Berlin” [“Sicherheitswehr
Groß-Berlin”, aussi “Sicherheitstruppe”], ayant
uniquement des fonctions de police et placée sous le commandement exclusif
du préfet de police. Ses membres sont stationnés partout dans la ville et
patrouillent avec les “Schutzpolizisten”[12].
Otto Wels (SPD) est nommé commandant de la ville de Berlin.
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À Gera (Thüringen) est constitué un conseil
d'ouvriers et de soldats[13].
Il élit un Comité exécutif [Vollzugsausschuß] composé
d'abord de deux USPD, un SPD et trois soldats, puis
augmenté de trois autres USPD. Le Comité exécutif
publie un appel dans lequel il annonce qu'il assume le pouvoir politique.
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Dans la région minière de Haute-Silésie, des conseils
d'ouvriers et de soldats se constituent à Gleiwitz (Gliwice, aujourd'hui en
Pologne), Kattowitz (Katowice, aujourd'hui en
Pologne), Hindenburg (Zabrze, aujourd'hui en Pologne), Tarnowitz
(Tarnowskie Góry, aujourd'hui en Pologne) et Rybnik
(aujourd'hui en Pologne)[14].
Des manifestations pro-polonaises organisées par la Fédération
professionnelle polonaise (Polnische Berufsvereinigung, ZZP)
ont lieu à Hindenburg, Königshütte (Chorzów,
aujourd'hui en Pologne), Beuthen (Bytom, aujourd'hui
en Pologne) et Sadolle (Zadole,
aujourd'hui en Pologne).
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Selon un témoignage de Wilhelm Groener[15], celui-ci, alors
Grand Quartier-maitre [Generalquartiermeister], tient
une conversation par téléphone avec F. Ebert au cours de laquelle
s'établit une entente mutuelle. D'une part, le corps des officiers s'engage
à soutenir le gouvernement s'il combat le bolchévisme, d'autre part le
gouvernement confirme le corps des officiers dans son autorité de
commandement. "Nous nous sommes alliés pour la lutte contre le
bolchévisme", dira Groener devant une commission
d'enquête en 1925 (au “Procès du coup de poignard” [“Dolchstoßprozeß”],
cf. ►):
"Je lui ai proposé [à Hindenburg] que le Commandement suprême de
l'Armée [OHL] s'allie avec les socialistes
majoritaires, puisqu'il n'y avait pas alors de parti qui eût assez
d'influence, parmi le peuple, en particulier sur les masses, pour rétablir
un pouvoir gouvernemental en commun avec le OHL."
(Cf. ci-dessous)
Il n'existe pas de preuve matérielle que cette conversation
ait eu lieu effectivement. Le fait est que ce même jour, Paul
von Hindenburg émet un ordre à l'armée (cf. ci-dessous) dans lequel
il annonce notamment que "l'OHL veut procéder en coordination avec le
chancelier du Reich Ebert [...] pour empêcher l'extension du bolchévisme
terroriste en Allemagne", puis le
12 novembre, le Conseil des mandatés du peuple publie un décret (cf. à
cette date) stipulant notamment que "le statut de
supérieur de l'officier demeure". Par ailleurs,
les efforts en faveur de la stabilisation de l'appareil d'état se
concrétisent également en ce qui concerne les institutions civiles (cf.
11 novembre).
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Lettre du comité exécutif de l'USPD au comité exécutif du SPD, 10 novembre 1918[16]
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À votre lettre du 9 novembre 1918 nous répondons ce
qui suit:
Afin de consolider les conquêtes socialistes
révolutionnaires, le Parti social-démocrate indépendant est prêt à entrer
au cabinet sous les conditions suivantes: Le cabinet doit être composé
uniquement de social-démocrates, lequel sont placés
côte à côte comme commissaires du peuple à égalité de droits. Pour les
ministres spécialisés cette restriction ne s'applique pas, ils ne sont que
des assistants techniques du cabinet qui prend les décisions. Aux côtés de
chacun parmi eux sont placés deux membres des partis social-démocrates
ayant des droits égaux, un de chaque parti. L'entrée des social-démocrates
indépendants au cabinet (dans lequel chaque parti envoie trois membres)
n'est pas liée à une échéance déterminée. Le pouvoir politique se trouve
dans les mains des conseils d'ouvriers et de soldats, qui doivent être
convoqués sans tarder à une assemblée plénière au niveau du Reich tout
entier. La question de l'assemblée constituante ne deviendra d'actualité
qu'avec la consolidation de la situation créée par la révolution et c'est
pourquoi elle doit être réservée à des discussions ultérieures. Pour le cas
d'une acceptation de ces conditions, qui sont dictées par le désir que
prolétariat se montre solidement regroupé, nous avons délégué au cabinet
nos membres Haase, Dittmann et Barth.
[Citation dans l'original ►.]
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Ordre du chef d'État-major
maréchal général de campagne [Generalfeldmarschall] Paul von Hindenburg à l'armée de terre
allemande, 10 novembre 1918 (extraits)[17]
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1. Afin que, face au danger de guerre civile qui
menace la patrie de par le bolchévisme, l'armée puisse être ramenée à la
patrie en gardant la solidité et l'ordre, tous les officiers et troupes
sont dans l'obligation morale de faire passer au second plan tous les
doutes de conscience, présentes à juste titre, concernant le serment de
fidélité au drapeau effectué vis-à-vis de sa majesté l'empereur et roi, et
d'accomplir leur devoir en vue du sauvetage du pays allemand du danger
suprême. [...]
2. Après que le mouvement vers la formation de
conseils de soldats a déjà fait intrusion dans l'armée de terre et ne peut
à mon avis être arrêté par la résistance, il est nécessaire que les
officiers en reprennent la maitrise. À cette fin, dans toutes les
compagnies, batteries, escadrons, doivent être formés des conseils de
confiance [Vertrauensräte]. [...] Il est recommandé de
constituer les conseils de confiance à l'issue d'élections libres par les
officiers et les troupes [...]. Les conseils de confiance doivent être
associés par les commandants de troupe de façon appropriée à la coopération
dans toutes les questions économiques et sociales, afin que l'ordre dans
l'armée soit maintenu. [...]
3. Il est permis d'annoncer que l'OHL veut procéder
en coordination avec le chancelier du Reich Ebert, jusque-là dirigeant du
Parti social-démocrate modéré, pour empêcher l'extension du bolchévisme
terroriste en Allemagne.
4. L'OHL a prié le chancelier du Reich, que du côté
du gouvernement soit décrété le maintien des insignes de rang. Entretemps
il faut s'en remettre dans les cas particuliers au tact de l'officier pour
qu'il agisse de sorte que des exactions de la part des troupes soient
évitées.
[Citation dans l'original ►.]
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Appel du Groupe Spartakus,
10 novembre 1918 (extraits)[18]
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Assurez le pouvoir que vous avez conquis!
[...] Dans l'accomplissement d'un programme
socialiste-révolutionnaire vous devez aller jusqu'au bout. Ce n'est pas
avec l'abdication de quelques Hohenzollern que c'est chose faite. Encore
moins c'est chose faite avec l'arrivée au sommet de quelques socialistes
gouvernementaux de plus. Ils ont soutenu la bourgeoisie pendant quatre ans,
ils ne peuvent que continuer de le faire. [...] Veillez à ce que le pouvoir
que vous avez conquis maintenant, ne vous échappe pas de vos mains et à ce
que vous l'utilisez en vue de votre objectif. Car votre objectif est
l'obtention immédiate d'une paix prolétarien-socialiste qui soit dirigée
contre l'impérialisme de tous les pays, ainsi que la transformation de la
société en une société socialiste. Pour l'obtention de cet objectif il est
avant tout nécessaire que le prolétariat berlinois en blouse et en uniforme
déclare poursuivre les revendications suivantes avec toute sa détermination
et sa volonté de combat indomptable:
1. Désarmement de
l'ensemble de la police, de l'ensemble des officiers ainsi que des soldats
qui ne se placent pas sur le terrain de l'ordre nouveau; armement du
peuple; tous les soldats et prolétaires qui sont armés, gardent leurs
armes.
2. Reprise de
l'ensemble des administrations et commandements civils par des hommes de
confiance du conseil d'ouvriers et de soldats.
3. Transfert de tous
les stocks d'armes et de munitions ainsi que de toutes les entreprises
d'armement au conseil d'ouvriers et de soldats.
4. Contrôle sur tous
les moyens de transport par le conseil d'ouvriers et de soldats.
5. Abolition de la
juridiction militaire, remplacement de l'obéissance militaire aveugle par
une discipline volontaire des soldats sous contrôle du conseil d'ouvriers
et de soldats.
6. Suppression du
Reichstag et de tous les parlements ainsi que de l'actuel gouvernement du
Reich; reprise du gouvernement par le conseil d'ouvriers et soldats
berlinois jusqu'à la création d'un conseil d'ouvriers et de soldats au
niveau du Reich.
7. Élection de
conseils d'ouvriers et de soldats partout en Allemagne, aux mains desquels
repose de façon exclusive la législation et l'administration. Pour
l'élection des conseils d'ouvriers et de soldats concourt l'ensemble du
peuple travailleur adulte en ville et à la campagne, et sans distinction de
genre.
8. Abolition de toutes
les dynasties et des états particuliers, notre consigne est: république
socialiste unitaire d'Allemagne.
9. Établissement
immédiat de contacts avec tous les conseils d'ouvriers et de soldats
existant en Allemagne et avec les partis socialistes frères à l'étranger.
10. Rappel
immédiat à Berlin de l'ambassade russe.
[...]
Aucun “Scheidemann” ne doit plus siéger au gouvernement;
aucun socialiste ne doit entrer au gouvernement, tant qu'en son sein siège
encore un socialiste gouvernemental. Il n'y a pas de communauté avec ceux
qui vous ont trahi pendant quatre ans.
À bas le capitalisme et ses agents!
Vive la révolution!
Vive l'Internationale!
[Citation dans l'original ►.]
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Témoignage de Wilhelm
Groener devant le tribunal d'instance de Munich, octobre‑novembre
1925[19]
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Question: [Vous avez] donné des indications concernant
des conversations que [vous avez] eues avec le future président du Reich
Ebert après l'éclatement de la révolution, et à ce propos [vous avez]
indiqué qu'Ebert a ensemble avec [vous] lutté contre la révolution. [...]
Groener: [...] Nous nous sommes
alliés en vue de la lutte contre la révolution, en vue de la lutte contre
le bolchévisme.
Question: [Vous avez] donc visé par vos propos [...] la
lutte contre la révolution, la lutte contre le bolchévisme?
Groener: La lutte contre le
bolchévisme, lequel trouvait son expression dans la révolution. À mon avis
il était complètement exclu de songer à une réintroduction de la monarchie.
Le but de notre alliance, que nous avions conclue le soir du
10 novembre, était la lutte jusqu'au bout contre la révolution,
rétablissement d'un pouvoir de gouvernement régulier, appui de ce pouvoir
de gouvernement par la puissance d'une troupe, et prompte convocation d'une
assemblée nationale Voilà ce qui était l'objectif.
Question: Concernant les propos que [vous avez] formulés
[...] selon lesquels le député Ebert voulait ensemble avec [vous] lutter
contre la révolution, je peux donc interpréter avec votre accord les
interpréter dans le sens qu'il voulait lutter contre le bolchévisme et le
chaos.
Groener: Bolchévisme et chaos et la
révolution encore en cours à l'époque.
[...]
Groener: Le 10 novembre le
commandement suprême de l'armée devait prendre une décision quant à la
question de ce qu'il devait faire. J'ai conseillé au maréchal de ne pas
pour l'instant lutter contre la révolution les armes à la main, parce qu'il
était à craindre que compte tenu de l'état des troupes une telle lutte par
les armes échoue. Je lui ai proposé: Je considère comme nécessaire que le
commandement suprême de l'armée s'allie avec la social-démocratie
majoritaire. Il n'y a pas actuellement à mon avis personnel un parti qui
ait une influence suffisante parmi le peuple, en particulier les masses,
pour pouvoir rétablir le pouvoir de gouvernement avec le commandement
suprême de l'armée.
[Citation dans l'original ►.]
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Après le congédiement d'E. Ludendorff, l'Allemagne
avait adressé une note au président US W. Wilson sollicitant la
formulation de conditions concrètes d'armistice. Une réponse positive
donnée le 5 novembre aboutit à la signature d'un armistice à
Compiègne, le 11 novembre.
L'armistice dispose que la zone située à l'ouest du Rhin
ainsi qu'une bande de 10 km de profondeur à l'est devront être
démilitarisées par l'Allemagne; la zone à l'ouest ainsi que des bandes d'un
rayon de 30 km autour de Cologne, Coblence et Mainz seront occupées
par des troupes britanniques et françaises[20].
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Pour contrecarrer les éventuels bouleversements dans
l'appareil d'état, le gouvernement déclare la continuité en ce qui concerne
les postes de direction (cf. ci-dessous). De son côté, le Conseil exécutif
s'affirme comme détenteur suprême du pouvoir exécutif (cf. ci-dessous).
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À Berlin une session du Conseil exécutif se tient au
cours de laquelle E. Däumig (USPD,
des “hommes de confiance”) demande la constitution d'une “garde rouge” qui
selon sa proposition serait composée de 2000 travailleurs organisés
dans les syndicats et formés sur des bases socialistes[21].
Le Conseil exécutif approuvera le projet et, le 13 novembre, lancera
un appel aux travailleurs de Berlin en ce sens. Mais l'appel sera retiré le
même jour à cause de l'hostilité manifestée par les conseils de soldats.
Néanmoins, le préfet de police E. Eichhorn s'efforce à mettre en oeuvre, en accord avec le Comité exécutif, le principe d'une
force armée de travailleurs dans le cadre de la Garde de sécurité.
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En Oldenburg, Paul Hug (SPD)
constitue un directoire [Landesdirektorium] en tant
qu'organe de gouvernement régional, avec la participation du SPD, du Parti
démocratique allemand (Deutsche demokratische Partei, DDP
‑ qui sera officiellement constitué le 20 novembre) et du Zentrum[22].
Ce n'est que sur pression du Conseil des 21 constitué le
6 novembre, que deux de ses représentants sont intégrés, à savoir August Jordan (SPD) et Bernhard Kuhnt (SPD)[23]. Ce dernier est
nommé président de la république.
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À Hambourg, Wilhelm Heise est désigné comme président
du conseil de soldats, Heinrich Laufenberg (de la
“Gauche radicale” [“Linksradikale”], désignation
utilisée communément pour un groupe de militants à Brême et Hambourg ayant
été exclu du SPD et qui n'a pas rejoint l'USPD) comme
président de l'exécutive du conseil d'ouvriers[24].
Laufenberg est aussi nommé président du conseil
d'ouvriers et de soldats.
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À Karlsruhe (Baden), le conseil d'ouvriers et de
soldats constitué le 9 novembre est dominé par des membres de l'USPD de Mannheim qui pendant l'été avait été recrutés pour
le service militaire forcé et étaient stationnés à Karlsruhe[25].
La présidence du conseil d'ouvriers et de soldats est d'abord assumée par Johann Brümmer (USPD) et Albert
Böpple (USPD). Participe également à la
direction Hans Berkenkopf (USPD)
de Karlsruhe. Le 11 novembre, le conseil de soldats est légitimé par
des élections. Le lendemain est également élu le conseil d'ouvriers, et une
présidence commune est constituée, composée de Richard Horter
(SPD) et Emil Weser (USPD). L'administration de la
ville par le Conseil municipal est assurée en accord avec le conseil
d'ouvriers et de soldats.
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Décret
du gouvernement, 11 novembre 1918[26]
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Les secrétaires d'état et les chefs des administrations
du Reich ont été chargés par le gouvernement du Reich de la continuation
provisoire des affaires. Il est interdit que des personnes non autorisées
pénètrent dans les bureaux des administrations du Reich et que de telles
personnes se charge d'affaires officielles.
[Citation dans l'original ►.]
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Appel
du Conseil exécutif au sujet du pouvoir exécutif, 11 novembre 1918[27]
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Aux habitants et soldats de Grand-Berlin!
Le conseil exécutif élu par les conseils d'ouvriers et de
soldats de Grand-Berlin a démarré son activité.
Toutes les administrations aux niveaux communaux,
d'états, du Reich et du militaire continuent leur activité. Toutes les
instructions de ces administrations s'effectuent sur l'ordre du conseil
exécutif du conseil d'ouvriers et de soldats. Chacun doit se conformer aux
instructions de ces administrations.
Tous les organismes administratifs formés provisoirement
depuis le début de la révolution dans le périmètre de Grand-Berlin, y
compris ceux qui portent le nom de conseil d'ouvriers et de soldats et qui
ont effectué certaines mesures administratives, cessent immédiatement
d'être en vigueur.
Toutes les instructions et dispositions ultérieures seront
décrétées au plus vite par les instances civiles et militaires compétentes.
Toutes les notifications et dispositions du conseil
exécutif seront signées par les deux présidents, Richard Müller et von Beerfelde.
[Citation dans l'original ►.]
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Déclaration
complémentaire du Conseil exécutif, 12 novembre 1918[28]
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Dans la résolution du conseil exécutif soussigné du
11 novembre il est décrété que Tous les organismes administratifs
formés provisoirement cessent immédiatement d'être en vigueur. Afin de
prévenir des malentendus auxquels cette disposition a donné lieu, est
déclaré par la présente: Les conseils d'ouvriers, de soldats et d'employés
constitués dans les différentes entreprises et formations, qui se limite à
différentes entreprises ou formations, restent tout comme avant en place et
leur constitution doit aussi se poursuivre. Cependant, un pouvoir exécutif
incombe à ces conseils uniquement dans le cadre de leur entreprise respectivement
leur unité de troupe et uniquement en rapport avec leurs propres affaires
locales.
[Citation dans l'original ►.]
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Le Conseil des mandatés du peuple adopte un appel annonçant
un certain nombre de dispositions, notamment l'élection à venir d'une
assemblée constituante, le droit d'association, la journée de travail de
huit heures (cf. ci-dessous). Cet appel sera publié le 14 novembre. Il
stipule en particulier la révocation de la loi sur le service auxiliaire
patriotique (cf. ►),
à l'exclusion des dispositions concernant les procédures de conciliation[29].
Le Conseil des mandatés du peuple émet un décret instaurant
l'“Office nationale pour la démobilisation économique” (“Office de
démobilisation”) [“Reichsamt für die wirtschaftliche
Demobilmachung” (“Demobilmachungsamt”)]. (Cf. le texte ►.)
Par ailleurs, le Conseil des mandatés du peuple confirme
"le rapport de supérieur hiérarchique de l'officier" ["Das Vorgesetztenverhältnis des Offiziers"] dans l'armée
de terre (cf. ci-dessous).
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À Hambourg, le conseil d'ouvriers et de soldats
adopte une résolution déclarant qu'il a assumé l'exercice du pouvoir
politique et que Senat et Bürgerschaft
[les institutions composant le parlement] n'existent plus[30].
Par cette décision, le conseil entend éliminer le Senat
et le Bürgerschaft comme institutions politiques, tout
en leur attribuant un rôle d'organes d'administration sous son contrôle.
Les titulaires de l'ancienne administration se déclareront prêts à
coopérer, et le nouveau fonctionnement sera mis en place le
18 novembre.
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À Stuttgart (Württemberg) sont
effectuées des élections au conseil d'ouvriers de Grand-Stuttgart][31].
La majorité des élus est proche du SPD.
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En Bavière, la branche régionale [Landesverband]
du Zentrum se sépare de celui-ci et se constitue en
“Parti bavarois du peuple” (“Bayerische Volkspartei”,
BVP).
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Appel
du Conseil des Mandatés du peuple, 12 novembre 1918 (extraits)[32]
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Au peuple allemand!
Le gouvernement issu de la révolution, dont la composition
est purement socialiste, se pose la tâche de réaliser le programme
socialiste. Il annonce dès maintenant, avec force de loi, ce qui suit:
1. L'état de siège est
levé.
2. Le droit
d'association et de réunion ne subit aucune restriction, ni même pour les
fonctionnaires et travailleurs de l'état.
3. Aucune censure
n'est effectuée. La censure dans le domaine du théâtre est levée.
4. L'expression de
l'opinion en parole et écrit est libre.
5. La liberté de
l'exercice de religions est garantie. Personne ne doit être obligé à un
acte religieux.
6. L'amnistie est
accordée pour tous les délits politiques. Les procédures en cours pour de
tels délits sont annulées.
7. La loi sur le
service auxiliaire patriotique [vaterländischer Hilfsdienst]
est abrogée, à l'exception des dispositions se rapportant à la conciliation
de différends.
8. Les règlementations
concernant les domestiques [Gesindeordnungen] sont
annulées, de même que les lois d'exception contre les travailleurs ruraux.
9. Les dispositions de
protection des travailleurs annulées au début de la guerre sont par la
présente remises en vigueur.
[...] Au plus tard le 1er janvier 1919 la journée de
travail de huit heures au maximum entrera en vigueur. Le gouvernement fera
tout afin de pourvoir à des opportunités d'emploi suffisantes. Un décret au
sujet de l'assistance aux personnes sans revenus est prêt. Il répartit les
charges entre Reich, État et Commune. Dans le domaine de
l'assurance-maladie l'obligation d'assurance sera étendue au-delà de la limite
actuelle de 2500 Mark. La pénurie de logements sera combattue par la
mise à disposition de logements. On oeuvrera en faveur
d'un ravitaillement alimentaire régulier du peuple.
Le gouvernement maintiendra l'ordre quant à la
production, protègera la propriété contre les atteintes de la part de
personnes privées, ainsi que la liberté et la sécurité de la personne.
[...]
[Citation dans l'original ►.]
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Décret du Conseil des Mandatés
du peuple concernant l'armée de terre, 12 novembre 1918 (extraits)[33]
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[...] Les rapports entre officiers et soldats doivent
être basés sur la confiance mutuelle. Pour cela, a subordination
consentante du soldat vis-à-vis de l'officier et le traitement amical du
soldat par le supérieur sont des conditions préalables. Le statut de
supérieur de l'officier demeure. L'obéissance inconditionnelle durant le
service est d'une importance décisive pour la réussite de la reconduite au
pays. [...] En vue du maintien de la confiance entre officiers et soldats,
les conseils de soldats ont une voix consultative dans les questions de
ravitaillement, congé, infliction de punitions disciplinaires. Leur devoir
suprême est d'oeuvrer aussi de leur côté pour
l'empêchement de désordres et mutineries. [...]
[Citation dans l'original ►.]
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Appel du Conseil exécutif en
vue de la formation d'une Garde rouge, 12 novembre 1918[34]
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Travailleurs et camarades du parti à Grand-Berlin!
La révolution nécessite d'être sécurisé. [...] 2000
camarades et travailleurs, formés comme socialistes et organisés
politiquement, ayant une formation militaire doivent prendre en charge la
protection de la révolution. Mettez-vous à disposition! Vous recevrez des
armes et être à disposition du conseil exécutif du conseil d'ouvriers et de
soldats. Il sera pourvu à votre solde et ravitaillement! [...]
[Citation dans l'original ►.]
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À Brême (Bremen), les partis et
groupes libéraux forment un Comité de citoyens [Bürgerausschuß]
‑ un organisme prévu dans la constitution censé assumer
certaines fonctions subordonnées en liaison avec le parlement[35].
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À Dresde (Sachsen) est constitué
le conseil central d'ouvriers et de soldats pour Saxe [Zentraler
Arbeiter- und Soldatenrat für Sachsen].
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En Prusse, SPD et USPD
établissent également un Conseil des mandatés du peuple comprenant les
membres suivants (dans sa composition finale du 27 novembre)[36]:
présidents Paul Hirsch (SPD) et Heinrich
Ströbel (USPD); ministres de la Justice Wolfgang Heine (SPD) et Kurt Rosenfeld
(USPD); ministres des Finances Albert
Südekum (SPD) et Hugo Simon (USPD); ministres
de l'Intérieur Hirsch et Rudolf
Breitscheid (USPD), avec Eugen
Ernst (SPD) comme adjoint; ministres de l'Éducation et des Affaires
culturelles [Wissenschaft, Kunst und Volksbildung] Konrad Haenisch (SPD) et Adolf Hoffmann (USPD); ministres de
l'Agriculture Otto Braun (SPD) et Adolf
Hofer (USPD); ministres du commerce et de
l'industrie Otto Fischbeck (DDP) et Otto Hue (SPD),
ministre pour les chemins de fer et travaux publiques Wilhelm
Hoff, Louis Brunner (SPD), Paul Hoffmann. Cependant; moyennant
quelques mesures transitoires, l'ancien ministre de la Justice Peter Spahn restera en place jusqu'au 27 novembre, le
ministre de la Guerre Heinrich Scheüch jusqu'au
2 janvier.
Un gouvernement restreint réunit, pour le SPD, O. Braun, E. Ernst, P. Hirsch, et pour l'USPD, A. Hoffmann, K. Rosenfeld,
H. Ströbel.
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À Brême (Bremen), au cours d'une
session du conseil d'ouvriers et de soldats, Alfred Henke
(USPD) proclame la destitution du parlement (Senat et Bürgerschaft)[37].
Le conseil assume désormais le pouvoir législatif, et le comité d'action le
pouvoir exécutif. À titre transitoire, est constitué un “comité des 12” [“12er Ausschuß”] composée de six membres du conseil
d'ouvriers et de soldats et six sénateurs (dont les deux maires)[38].
La mesure sera annoncée publiquement le lendemain.
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En Saxe est constitué un conseil de mandatés du
peuple composé de trois membres SPD et trois USPD,
sous la présidence de Richard Lipinski (USPD)[39].
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Les dispositions du Traité de Versailles comprennent entre
autre l'intégration des provinces Posen et Prusse de
l'Ouest à la Pologne. Cette modification des frontières sera réalisée
effectivement en 1920; jusque-là, les territoires resteront sous
administration allemande.
Le 14 novembre le Polonais constituent à Posen (aujourd'hui Poznań, en Pologne) le Conseil
suprême du peuple (Oberster Polnischer Volksrat, Naczelna Rada Ludowa)[40].
Il crée une dépendance à Beuthen (Bytom,
Haute-Silésie, aujourd'hui en Pologne) et donne des consignes aux membres
polonais des conseils en Haute-Silésie en vue de la coopération avec les
membres allemands. Les députés polonais au niveau national et régional
appellent leurs partisans à participer aux conseils.
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Appel des mandatés des Conseils
d'ouvriers et soldats de Dresde, Leipzig et Chemnitz, 14 novembre 1918
(extraits)[41]
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Au peuple de Sachsen!
Le système capitaliste a subi son effondrement. [...] Le
prolétariat révolutionnaire a repris le pouvoir public. Son objectif est la
république socialiste.
Réalisation du socialisme signifie: transformation de la
production capitaliste en production sociale, expropriation de la propriété
privée des terrains, mines et usines sidérurgiques, matières premières,
banques, machines, moyens de transport etc., transformation de la
production de marchandises en production socialiste, reprise de la
production par le prolétariat. [...]
[Citation dans l'original ►.]
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