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À Kiel, des affrontements ont lieu avec la Brigade de
Marine III” commandée par le capitaine de corvette Wilfried
von Loewenfeld, il y a 68 morts[1].
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Le major général Hans von Seeckt,
exerçant provisoirement ‑ depuis le 17 mars ‑ le
commandant suprême militaire dans le périmètre du Commandement de
groupe 1 [Gruppenkommando 1], adresse une
note à ses subordonnés, dans laquelle il caractérise la situation comme
"lutte pour la survie" et affirme qu'on se trouve "devant
une tentative de la plus grande envergure pour l'instauration de la
république des conseils" (cf. ci-dessous][2].
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Une réunion se tient à Berlin entre représentants du
gouvernement du Reich, du gouvernement de Prusse, des partis de la majorité
gouvernementale et des syndicats[3].
Le président de la direction locale de Berlin de l'ADGB [Berliner Gewerkschaftskommission], Oskar Rusch (USPD), soumet les
revendications suivantes[4]:
1. Reconstitution complète du cabinet, uniquement
des travailleurs social-démocrates comme gouvernants.
[...] Nous ne considérons pas qu'une constitution ne puisse pas être
modifiée. Donc modification de la constitution.
2. Retrait immédiat de toutes es troupes en état de
mutinerie et dissolution et désarmement. [...]
3. [...] Dissolution de l'ensemble des bandes de
mercenaires, aussi des gardes civiles.
4. Dissolution du Secours technique. À la place garde
ouvrière pour le maintien de l'ordre et de la sécurité.
[...]
6. Levée immédiate de l'état d'exception
[Citation dans l'original ►.]
Carl Legien (SPD, président de la
Commission générale des syndicats) développe les revendications en exposant
un programme en neuf points de l'ADGB, de l'Afa-Bund
et du DBB (cf. ci-dessous).
L'USPD présente une déclaration qui
affirme le soutien à ces positions, mais formule en outre des
revendications propres[5]:
Dissolution de toutes les gardes de sécurité militaires,
de la garde civile, désarmement de la bourgeoisie et des propriétaires de
terre, gardes révolutionnaires; libération de tous les prisonniers
politiques. Socialisation immédiate, élection immédiate de conseils
d'ouvriers révolutionnaires, tribunaux d'exception.
[Citation dans l'original ►.]
D'autre part, en dehors des entretiens mentionnés ci-dessus,
le vice-chancelier Eugen Schiffer et le
sous-secrétaire d'état Hermann Geib négocient avec les
syndicats chrétiens et les Associations de métier Hirsch‑Dunker,
lesquels déclarent être d'accord pour arrêter la grève générale[6].
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Le vice-chancelier E. Schiffer
fait publier une déclaration annonçant l'échec du putsch et appelant à la
reprise du travail[7].
Le texte est signé "L'adjoint du chancelier du Reich Schiffer".
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Un appel est diffusé au nom de l'ADGB,
de l'Afa et du DBB, en faveur de la poursuite de la grève générale jusqu'à
la satisfaction d'un certain nombre d'exigences, adressées au gouvernement
(cf. ci-dessous)[8]:
Il est confirmé par un appel dans le même sens signé par la direction de
grève centrale de Berlin de l'Afa (cf. ci-dessous)[9].
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Programme
en neuf points adopté par l'ADGB, l'Afa et le DBB,
18 mars 1920 (extraits)[10]
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I. Influence décisive des fédérations de salariés
mentionnés sur la transformation des gouvernements dans le Reich et dans
les Länder ainsi que sur la réorganisation de la
juridiction en matière d'économie et de politique sociale.
II. De façon immédiate, désarmement et châtiment de
toutes les troupes ayant participé au putsch et châtiment de toutes les
personnes qui ont participé au renversement du gouvernement légal ou qui en
tant que fonctionnaires du Reich, des Länder ou communes se sont mis à la
disposition de gouvernements illégaux.
III. Démission immédiate du ministre du Reich Noske ainsi
que des ministres prussiens Oeser et Heine.
[...]
VII. Socialisation immédiate des mines et de la
production d'énergie, prise en charge du syndicat du charbon et de celui du
Kali par le Reich.
VIII. Soumission immédiate d'un projet de loi en vue de
l'expropriation des propriétaires terriens qui ne fournissent pas les
vivres disponibles ou qui ne gèrent pas leur entreprise dans l'intérêt du
peuple dans son ensemble [...]
IX. Dissolution des formations militaires
contrerévolutionnaires, prise en charge du service de sécurité par les
masses de travailleurs organisés.
[Citation dans l'original ►.]
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|
Appel de l'ADGB,
de l'Afa et du DBB, 18 mars 1920 (extraits)[11]
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•
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Travailleurs, employés et fonctionnaires! La grève
générale a pour l'instant produit le succès que les Kapp et Lüttwitz ont
été écartés. Mais avec cela la lutte n'est pas encore terminée. La
soldatesque domine encore les rues de Berlin. L'information apportée de
différents côtés, que Noske en tant que commandant suprême des troupes
devrait revenir à Berlin, nous parait selon les négociations menées
jusqu'ici avec le gouvernement constitutionnel exclue. D'abord toutes les
troupes non fiables doivent être écartées et désarmées totalement. La
réorganisation des troupes doit s'effectuer de telle sorte que dans
l'avenir tout putsch militaire sera impossible. [...] Toute information que
nous aurions établi une quelconque liaison avec Kapp et consorts, est
fausse. [...] La grève générale doit être poursuivie, jusqu'à ce que nos
revendications soient satisfaites! Évitez les rassemblements et garder le
calme!
[Citation dans l'original ►.]
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Appel de la direction centrale
de grève de Berlin de l'Afa, 18 mars 1920[12]
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Employés! Fonctionnaires! La grève générale se poursuit!
L'Union générale libre d'employés (Afa) négocie avec les instances
compétentes sur les revendications minimales suivantes:
1. Dehors la dictature militaire!
2. Retrait immédiat des troupes, et leur
désarmement!
3. Transfert du service de sécurité aux masses de
travailleurs organisées.
4. Participation décisive des syndicats à la
réorganisation de la situation
[...] La grève générale continue!
[Citation dans l'original ►.]
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Résolution
des Conseils d'ouvriers de Sachsen, 18 mars 1920[13]:
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•
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Les conseils d'ouvriers de Sachsen et de localités
limitrophes de Bavière et de Thüringen, rassemblés le 18 mars 1920 au "Kaufmännisches
Vereinshaus" à Chemnitz, ont approuvé à l'unanimité les revendications
suivantes:
1. De façon immédiate, désarmement et suppression de la Reichswehr, de la garde de sécurité, de la garde civile et
des unités de volontaires temporaires. L'armement du prolétariat doit être
entrepris. Comme premier pas en ce sens, doit être effectuée la formation
d'une garde ouvrière sous contrôle des conseils d'ouvriers.
2. Dans toutes les usines, ateliers, mines et comptoirs,
les travailleurs en ville et à la campagne, les employés, hommes et femmes
travailleurs, se rassemblent immédiatement et élisent des conseils
d'ouvriers révolutionnaires. Les conseils d'entreprises se regroupent en
conseils locales et de district. Les conseils de district à leur tour doivent
être regroupés en un congrès central des conseils.
3. Les conseils d'ouvriers élus dans les entreprises et
ateliers se regroupent dans des assemblées plénières. L'assemblée plénière
du conseil d'ouvriers doit prendre position sur toutes les questions importantes.
Elle élit un conseil exécutif et charge celui-ci de mettre en oeuvre toutes les décisions et de diriger des actions
requises. Les conseils d'entreprise nouvellement élus exercent le contrôle
sur la production. Ils ont le droit de procéder à des embauches et des
licenciements de travailleurs.
4. Tous les prisonniers et détenus politiques qui se
trouvent dans les prisons allemands, doivent être libérés immédiatement.
5. Toutes les Mesures des conseils d'entreprise depuis le
soulèvement des Kapp-Lüttwitz sont des mesures de
défense contre les soulèvements de la contrerévolution. Il ne doit pas y
avoir de sanctions de travailleurs et fonctionnaires, de poursuites et
condamnation de droit civil pour ce motif. Là où malgré tout des
tentatives en ce sens sont entreprises, la tâche incombe au conseil
d'ouvrier d'empêcher de telles tentatives par tous les moyens à sa
disposition.
6. La grève générale était une mesure de défense
nécessaire contre le soulèvement de la contrerévolution. Les pertes de
salaire occasionnées par là doit être compensée par les entrepreneurs pour
tous les travailleurs. Pour les entreprises qui refusent de payer les jours
de grève, les livraisons de matières premières et de moyens de production
de tout type seront bloquées. Dans leurs entreprises, la grève sera
poursuivie jusqu'à ce qu'ils se déclarent prêts à payer tous les jours de
grève.
[Citation dans l'original ►.]
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Instruction du commandement de
groupe 1 de la Reichswehr aux unités
subordonnées, (vraisemblablement) 18 mars 1920[14]
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•
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1. Il est certain que nous sommes placés devant une
tentative de la plus grande envergure, d'introduction de la république des
conseils. L'ennemi a l'intention, par des insurrections dans les grandes
villes, de coincer la Reichswehr à l'intérieur de
celles-ci et de les encercler ensuite en amenant de l'extérieur des troupes
rouges. On est en présence de signes, que l'ennemi est bien dirigé,
peut-être par des militaires connaissant leur domaine. De même sa
propagande, minant les troupes, semble bien organisée.
2. [...] Partout où la troupe rencontre de la résistance,
la force des armes de la troupe doit être employée avec une énergie sans
ménagement et les moyens de combat les plus lourds. Des négociations, que
l'ennemi entame uniquement pour gagner du temps et pour désorienter la
troupe, doivent être évitées méticuleusement. [...]
3. Toutes les ressources aidant à renforcer la Reichswehr (gardes civiles, unités de volontaires
temporaires, secours technique) doivent être mises à contribution dans
toute leur envergure, l'ensemble de la population ayant le sentiment
national, y compris les travailleurs, doivent être déployées pour la
participation.
4. Des informations récentes indiquent que des parties
considérables des syndicats, des unions de fonctionnaires et d'employés
semblent, dans la confusion politique actuelle, se joindre au mouvement en
faveur de l'introduction de la république des conseils, qu'ils sont donc
hostiles.
[Citation dans l'original ►.]
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•
|
La direction locale de l'ADGB de Berlin
[Berliner Gewerkschaftskommission] se prononce en
faveur de la poursuite de la grève générale (cf. ci-dessous).
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À Leipzig, des troupes du général Senfft
von Pilsach investissent le bâtiment du Volkshaus
‑ lieu de réunion traditionnel du mouvement ouvrier local ‑,
en alléguant que là se trouve le "quartier général des
Spartakistes"[15].
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|
Des unités du corps-franc commandé par le lieutenant en chef Gerhard Roßbach entrent à Wismar (Mecklenburg/Vorpommern)[16].
Il y a sept morts parmi la garde ouvrier qui s'opposent à ces troupes.
À Rostock (Mecklenburg/Vorpommern),
des troupes de volontaires contrerévolutionnaires d'un effectif d'environ
600 hommes avaient été encerclées, puis avaient réussi à s'échapper,
mais les formations de travailleurs armés les poursuivent et les désarment
dans les environs de la ville[17].
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•
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Les troupes insurrectionnelles dans la Ruhr occupent Essen
et Remscheid (Nordrhein Westfalen)[18].
Les troupes de la Reichswehr et de la police de
sécurité sont contraintes de se retirer à Wesel (Nordrhein
Westfalen).
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Par un décret du président l'état d'exception renforcé est
instauré dans le périmètre de commandement de groupe 1 [Gruppenkommando 1]
(Allemagne du centre, nord et est)[19].
Le décret est signé par vice-chancelier E. Schiffer
au nom du président et le major général H. v. Seeckt
au nom du ministre de la défense. Le pouvoir de former des tribunaux
militaires d'exception, conféré par le décret au ministre de la défense,
est exercé par Seeckt en tant que commandant militaire.
Dans son action militaire, H. v. Seeckt
a recours aux forces suivantes[20]:
dans la Ruhr, les corps-francs commandés respectivement par le lieutenant
en chef Gerhard Roßbach, le colonel Wilhelm
Faupel, le capitaine Franz Pfeffer von Salomon,
la Brigade commandée par le colonel Franz von Epp, la
Brigade de Marine III” commandée par le capitaine de corvette W. v. Loewenfeld; en outre sont utilisés en
Allemagne du Centre, la “Brigade de Marine II” commandée par le
capitaine de corvette Hermann Ehrhardt, la Division de
fer commandée par le major Josef Bischoff.
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À Stettin (Pommern) (Szczecin,
aujourd'hui en Pologne) les ouvriers, avec une garde
ouvrière fort de plusieurs milliers d'hommes dominent les quartiers
périphériques et le chantier naval Vulkan-Werft,
contrôlent au moyen de bateaux l'entrée du port et une partie de l'Oder[21].
Le vice-chancelier E. Schiffer
demande au président de Pommern Julius Lippmann d'imposer le désarmement des travailleurs à Stettin
(Pommern)[22].
Lippmann obtient un appel du comité d'action [Aktionsausschuß] en ce sens.
Dans les environs de Greifswald (Pommern), durant les journées 18 et
19 mars, les travailleurs agricoles entreprennent de nombreuses actions
contre les Baltikumer et les propriétaires terrains: saisie d'armes,
sabotage des lignes de téléphone et blocage des routes[23].
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À partir du 15 mars, environ 12 millions de
travailleurs se joignent à la grève générale[24].
Les troupes insurrectionnelles dans la Ruhr,
désignées souvent comme “Rote Ruhr-Armee”, rassemblent
un effectif estimé à 50 000-80 000 hommes[25].
Les centres de commandement sont multiples[26].
À Hagen, le 19, le comité d'action [Aktionsausschuß]
formé des SPD, USPD et KPD, constitue une commission
de défense [Verteidigungs-Kommission], dirigée par le
secrétaire du syndicat des travailleurs des mines Josef Ernst (USPD). Cette commission s'appellera par la suite comité
central de défense [Zentraler Verteidigungsausschuß],
ceci dans l'idée de se considérer comme le plus haut commandement de
l'armée de la Ruhr. À Essen, le 25, les conseils exécutifs [Vollzugsräte] d'un certain nombre de centres constituent un
conseil central [Zentralrat]. Quant aux orientations
respectives, à Hagen l'USPD est prépondérant, à Essen
le KPD. Des commandements locaux se constituent les 19‑20 à Oberhausen,
à Hamborn/Walsum/Dinslaken
(dirigé par des communistes), à Mülheim; ils se
regroupent le 26 sous la dénomination “quartier général armée rouge
dictature du prolétariat” [“Hauptquartier Rote Armee Diktatur
des Proletariats”]. À Marl, le 20,
une assemblée de travailleurs exclut le SPD du conseil exécutif [Vollzugsrat], lequel se constitue en “direction centrale de
l'armée rouge” [“Zentralleitung der Roten Armee”],
sous la présidence de Karl Wohlgemuth (USPD);
les 21-22 se constitue un commandement local à Dorsten
qui, le 24, se regroupe avec celui de Marl; puis,
le 30, Marl /Dorsten se soumettent au
commandement de “quartier général armée rouge dictature du prolétariat”.
Par ailleurs, d'autres commandements locaux se constituent à Kamen, à Lünen, à Unna; le premier est en liaison avec le conseil exécutif
de Dortmund, les deux autres le sont avec le comité central de défense de
Hagen.
Des structures armées de travailleurs similaires à celles de
la Ruhr se constituent en Thüringen, Stettin (“Rote Vulkanarmee”), Rostock, Niederlausitz[27].
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Déclaration de la direction
locale de Berlin de l'ADGB [Berliner Gewerkschaftskommission], 19 mars 1920[28]
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•
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Le comité de la commission syndicale de Berlin et
environs a adopté les résolutions suivantes:
1. La grève se
poursuit.
2. La commission
syndicale demande l'instauration d'un gouvernement ouvrier socialiste.
3. Le retrait
immédiat des troupes en mutinerie, leur dissolution et désarmement,
dissolution de la Reichswehr, de la garde de sécurité
et la garde civile et établissement d'une garde ouvrière pour le maintien
de l'ordre.
4. La commission
syndicale demande une participation décisive des syndicats à la
réorganisation de la situation économique et politique.
[Citation dans l'original ►.]
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•
|
L'assemblée nationale se transfère de nouveau à Berlin[29].
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•
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Les négociations entamées le 18 mars à Berlin
entre représentants gouvernementaux, politiques et syndicaux aboutissent au
cours d'une session tenue la nuit du 19 au 20 mars[30].
L'accord comprend huit points ainsi que l'annonce de la démission du
ministre de la défense Gustav Noske et du ministre prussien de l'intérieur
Wolfgang Heine (cf. ci-dessous). Les syndicats ayant participé aux
négociations déclarent la grève générale comme terminée (cf. ci-dessous)[31].
Les représentants de l'USPD annoncent qu'ils ne sont
pas encore habilités à signer l'accord.
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•
|
L'accord conclu à Berlin prévoit la convocation d'une
commission de socialisation [Sozialisierungskommission][32].
C'est la “seconde commission de socialisation”, de composition modifiée par
rapport à la “première”, constituée le 18 novembre 1918. On peut
distinguer parmi les membres quatre groupes: 1. des intellectuels
socialistes, tels que Rudolf Hilferding (USPD), Karl Kautsky (USPD),
Emil Lederer (économiste) et le statisticien Robert Kuczynski; 2. des syndicalistes comme Adolf Cohen (DMV), Otto Hue (SPD,
dirigeant syndical de la Fédération pour la préservation et la promotion
des intérêts des mineurs en Rhénanie et Westphalie), Paul Umbreit de la Commission générale
des syndicats d'Allemagne; 3. des industriels haut placés comme
Carl Friedrich von Siemens ainsi qu'en tant que
conseillers Hugo Stinnes et Paul
Silverberg; 4. un groupe intermédiaire, avec Walther
Rathenau et Theodor Vogelstein (économiste et
banquier, DDP) qui avaient été des organisateurs de l'économie de guerre,
ainsi que Hugo Lindemann (SPD, ex-ministre en
Württemberg) et Rudolf Wissel (SPD, ex-ministre de
l'économie). (Cf. ci-dessous quelques indications biographiques.)
Le “comité du charbon” [“Kohleausschuß”]
de la commission tiendra une première réunion le 22 avril. Les travaux
de la commission resteront sans résultat concret et en mars 1922
l'Assemblée nationale supprimera son financement, ce qui entrainera sa
disparition[33].
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•
|
La direction centrale de grève de Berlin, influencée
par l'USPD et le KPD, maintient la mobilisation pour
la grève générale[34].
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À Hagen (Nordrhein Westfalen)
une conférence se tient entre des représentants du SPD, USPD
et KPD de la région industrielle de la Ruhr[35].
Le secrétaire de l'USPD de Hagen, J. Ernst, fait
parvenir au chancelier Gustav Bauer (SPD) un télégramme[36]:
Les trois partis socialistes de la région industrielle,
qui étaient réunis ce matin ici pour une conférence, se plaçaient
unanimement dans le point de vue qu'il faut faire intervenir toutes les
forces, afin d'écraser la réaction. D'aucune manière elle ne peut apporter
sa confiance au général v. Watter, qui en tant
qu'officier monarchiste réactionnaire appelait ce matin les travailleurs à
la remise des armes, mais qui jusqu'à aujourd'hui n'a encore rien fait pour
désarmer le bataillon Schulz qui se place sur le terrain du gouvernement
Kapp. Nous demandons la cessation immédiate des mouvements de troupes, car
autrement, à titre de légitime défense, nous serions contraints de passer à
l'attaque, afin d'empêcher que des corps de troupes réactionnaires
concentrées dans la région industrielle sème la terreur blanche. La
conférence refuse unanimement l'instauration de la dictature des conseils
et se place dans son action sur un terrain tout à fait légal, mais demande
des garanties pour être prémunie face à la réaction. En opposition à toutes
les autres allégations, nous déclarons que dans la région industrielle
prévalent le calme et l'ordre au plus haut point et que le travail a été repris
à l'exception des travailleurs sous armes. Nous vous sollicitons pour
prendre des décisions immédiates;
[Citation dans l'original ►.]
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•
|
À Mülheim (Nordrhein Westfalen) est constitué un comité d'action [Aktionsausschuß][37].
Selon la déclaration publiée à cette occasion, il vise à:
exercer le pouvoir dictatorial seulement jusqu'à ce que
soit élu un conseil d'ouvriers définitif, issu des rangs des conseils
d'entreprise se plaçant sur le terrain de la dictature du prolétariat.
[Citation dans l'original ►.]
Des élections de conseils d'entreprise se tiendront
les 22 et 23, et le 24 sera élu un conseil exécutif [Vollzugsrat].
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•
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Dans la région de la Ruhr les troupes insurrectionnelles
poursuivent leurs attaques. Düsseldorf, Hamborn, Oberhausen, Ahlen, Iserlohn et Hamm sont occupés le 20[38].
Le 23, la prise de contrôle de l'ensemble de la région minière ainsi
que la région limitrophe au sud sera achevée: jusqu'à Remscheid
au sud, la Lippe au nord, Hamm,
Ahlen et Beckum à
l'est.
En particulier, près de Mühlheim,
des troupes insurrectionnelles infligent une défaite totale au corps-franc
commandé par le major Siegfried Schulz[39].
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•
|
À Rostock (Mecklenburg), le dirigeant des unités
armes de travailleurs Karl Otto (KPD) s'efforce à maintenir la mobilisation
en Mecklenburg[40].
Une réunion se tient entre représentants de 27 comités d'action, mais
seulement les délégués de Wismar ainsi que de cinq petites localités où le
mouvement des travailleurs agricoles est fort, se prononcent pour la
poursuite de la grève générale. Le gouvernement régional instaure l'état
d'exception renforcé et impose le désarmement des travailleurs. Pour cela,
le major général Weber qui a été chargé de remplacer le général Paul von Lettow-Vorbeck, mobilise ses troupes, y compris le
corps-franc commandé par le lieutenant en chef Gerhard
Roßbach, ainsi que le corps-franc commandé par le major Paul Sieveking stationné à Hambourg. (Le corps-franc de Sieveking rassemble ce qui reste de la Section de garde
volontaire Bahrenfeld[41]
‑ cf. 12 mars 1919).
La Garde ouvrière [Arbeiterwehr]
s'était constituée le 14 mars, et atteignait un effectif d'environ
8000 hommes[42].
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À Brünzow, près de Greifswald (Pommern), des travailleurs agricoles armés encerclent une
unité de volontaires contrerévolutionnaires et l'obligent à capituler[43].
Mais ils les laissent finalement partir, avec leurs armes.
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|
Accord en 8 points, 20 mars
1920[44]
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•
|
1. Les représentants présents des partis gouvernementaux
interviendront auprès de leurs groupes à l'assemblée nationale pour qu'à
l'occasion de la formation imminente des nouveaux gouvernements dans le
Reich et en Prusse, la question des personnes soit résolue par les partis
après un arrangement avec les organisations syndicales des travailleurs,
employés et fonctionnaires participant à la grève générale, et qu'à ces
organisations soit concédé une influence décisive sur la redéfinition des
lois en matière d'économie et de politique sociale, tout en préservant les
droits de la représentation du peuple.
2. Désarmement et châtiment immédiats de tous les
coupables en rapport avec le putsch ou le renversement des gouvernements
constitutionnels ainsi que des fonctionnaires qui se sont mis à la
disposition de gouvernements illégaux.
[...]
6. Mise en route immédiate de la socialisation des
branches de l'économie qui sont mures pour cela, sur la base des décisions
de la commission de socialisation, à laquelle doivent être associés des
représentants des unions professionnelles. La convocation de la commission
de socialisation s'effectue immédiatement. Prise en charge par le Reich du
syndicat du charbon de celui du Kali.
7. Dissolution de toutes les formations militaires
contrerévolutionnaires qui ne sont pas restées fidèles à la constitution et
leur remplacement par des formations venant des cercles de la population
républicaine fiable, en particulier des travailleurs, employés et
fonctionnaires organisés, sans désavantager un groupe quelconque. [...]
[...]
En outre les représentants des partis gouvernementaux se
sont déclarés prêt à insister auprès de leurs groupes à l'assemblée
nationale en vue de l'annulation de la détention préventive pour les personnes
concernées. De plus il a été annoncé durant la réunion que les ministres
Noske et Heine auraient d'ores et déjà sollicité leur mise en congé.
[Citation dans l'original ►.]
|
|
•
|
Au sujet de la formule qui introduit le premier point ‑ "
Les représentants présents des partis gouvernementaux interviendront auprès
de leurs groupes à l'assemblée nationale" ‑, la
chancellerie précise qu'elle s'applique à l'ensemble des points de l'accord[45].
|
|
Déclaration de l'ADGB,
de l'Afa-Bund et du DBB, 20 mars 1920[46]
|
•
|
À tous les travailleurs, employés et fonctionnaires!
La conférence de représentants des organisations
syndicales des travailleurs, employés et fonctionnaires participant à la
grève générale déclare qu'elle n'est certes pas totalement satisfaite des
arrangements avec les représentants de représentants des groupes de partis
gouvernementaux, obtenus par son comité de négociation, mais qu'elle les
approuve néanmoins et qu'elle déclare par là la grève générale comme
terminée aujourd'hui même.
[Citation dans l'original ►.]
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|
•
|
Cf. ►.
En 1920, ensemble avec Albert Vögler,
H. Stinnes constitue la société Montankonzern
Rhein-Elbe-Union GmbH. Ce groupe s'allie à celui de Siemens,
dans le cadre d'un groupement d'intérêt économique [Interessengemeinschaft]
dénommé Siemens-Rhein-Elbe-Schuckert-Union GmbH.
En 1920 également, H. Stinnes devient membre du DVP
ainsi que député à l'Assemblée nationale.
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|
Carl Friedrich
von Siemens
|
•
|
C. F. v. Siemens est
d'abord membre de la direction de Siemens & Halske AG
(à partir de 1904), et de celle de Siemens-Schuckertwerke
GmbH (à partir de 1912). En 1919 il devient président des conseils
de surveillance respectifs de ces deux groupes. En mars 1918, lors de la
fondation de l'Union centrale de l'industrie électrotechnique allemande [Zentralverband der deutschen elektrotechnischen Industrie],
il est désigné comme président de cette union.
C. F. v. Siemens est
membre du DDP dès sa fondation en 1918, mais quitte le parti en 1924. Il
est député à l'assemblée nationale de 1920 en 1924.
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•
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À partir de 1903, P. Silverberg
est directeur général de la Fortuna AG, transformée en 1908 en Rheinische AG für Braunkohlenbergbau und Brikettfabrikation
(RAG). Cette société crée en 1910 la filiale Rheinisches
Elektrizitätswerk im Braunkohlenrevier AG (REW)
|
|
•
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En 1904, W. Rathenau entre au conseil de surveillance
de la société Allgemeine Elektricitäts-Gesellschaft (Société
générale d'électricité, AEG), dont il devient
président en 1912.
En 1919 W. Rathenau participe à la fondation du DDP.
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Mesures contre les putschistes
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•
|
Après l'abandon par Walther von Lüttwitz
et Wolfgang Kapp de leur tentative de putsch, le major général H. v. Seeckt avait amené Hermann
Ehrhardt ‑ qui avec sa Brigade de Marine II avait
été l'un des principaux soutiens de Lüttwitz ‑
à se soumettre à son commandement "en vue de la lutte difficile
imminente contre la terreur armée spartakiste" ["im
bevorstehenden schweren Kampf gegen den bewaffneten spartakistischen
Terror"][47].
Finalement, la Brigade de Marine II sera dissoute le 31 mai, de
même que la Brigade de Marine III commandée par Wilfried
von Loewenfeld. Ehrhardt s'enfuit, en passant
par la Bavière, en Hongrie[48].
Le 24 mars un mandat d'arrêt est lancé concernant W. v. Lüttwitz[49].
Il s'enfuira à l'étranger.
Burghard von Oven sera relevé de ses
fonctions le 20 mai[50].
P. v. Lettow-Vorbeck est envoyé par
H. v. Seeckt à Breslau comme commandant de la 2e division de
cavalerie, poste pour lequel il était prévu depuis janvier 1920[51].
Mais avant d'assumer cette fonction, il fera l'objet d'une enquête et sera
mis à la retraite en octobre 1920[52].
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Gustav
Noske défend son honneur
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•
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La démission de G. Noske avait été annoncée le
20 mars[53].
En effet Noske avait adressé au président F. Ebert une lettre en ce
sens le 18. Cependant, Ebert ne souhaitait pas prendre une telle
décision. Le 22 finalement il cède aux demandes exprimées notamment
par Philippe Scheidemann, Otto Wels et C. Legien.
Il signera le document relevant Noske de ses fonctions le 25. Fin
juin, Noske sera nommé président de la province Hannover
par le ministre de l'intérieur de Prusse Carl Severing.
Après la prise du pouvoir par les national-socialistes
il sera d'abord mis en congé, puis destitué comme fonctionnaire ‑ peu
avant d'avoir atteint l'âge de la retraite ‑ sur la base du
§ 4 de la "loi pour le rétablissement de la fonction
publique" ["Gesetz zur Wiederherstellung des
Berufsbeamtentums"]. Cette loi, publiée le 7 avril 1933,
stipule dans le paragraphe invoqué: "Des fonctionnaires qui selon leur
activité politique passé n'offre pas la garantie qu'à tout moment ils
prendront fait et cause sans réserve pour l'état national, peuvent être
congédiés du service." ["Beamte, die nach ihrer
bisherigen politischen Betätigung nicht die Gewähr dafür bieten, daß sie
jederzeit rückhaltlos für den nationalen Staat eintreten, können aus dem
Dienst entlassen werden."] Noske adressera le 29 septembre
1934 une lettre à Hermann Göring, ministre de l'intérieur de Prusse, pour
demander ‑ en vain ‑ l'annulation de cette mesure.
Voici le texte de cette lettre[54]:
Par la présente je sollicite en vue de la dernière
échéance de demain, l'annulation de l'arrêté du 21 septembre 1933 qui
m'a été signifié le 26 septembre, 4 jours avant que je n'atteigne
la limite d'âge, arrêté par lequel fut prononcé avec effet immédiat mon
licenciement du service public prussien sur la base du § 4 de la loi
pour le rétablissement de la fonction publique du 7 avril 1933. La possibilité
d'un recours ne m'a pas été présentée, alors qu'en règle générale aux
fonctionnaires à licencier a été concédé un délai de recours. Le reproche
de fiabilité nationale insuffisante est injustifié. Longtemps avant la
guerre mon esprit patriotique a été reconnu, et elle a été louée pendant la
guerre. Je renvoie simplement à l'effet de mon discours dit de Baralong au Reichstag le 15 janvier 1916. Mon activité
couronnée de succès, en particulier pour le rétablissement de l'ordre en
Allemagne et pour l'écrasement du communisme en tant que ministre de la
Reichswehr est établie devant l'histoire. Ensuite en tant que président [Oberpräsident] j'ai administré la province fidèle au devoir
durant 13 ans, de sorte que les cercles les plus larges de la
population m'appréciaient, ce pourquoi des preuves nombreuses m'ont été
fournies. C'est pourquoi monsieur le premier ministre prussien Göring, par
arrêté du 17 février 1933, m'a autorisé de partir en congé, après m'avoir
assuré oralement qu'il souhaite que je ne subisse aucune diminution du
montant de la pension à percevoir. Je n'ai pas pu prendre connaissance de
raisons pour ce licenciement vexant. Je vous prie d'entendre en particulier
monsieur le ministre des finances Dr Popitz, qui m'a
assuré qu'il considère mon licenciement selon le § 4 comme inapproprié
au vu de mes mérites pour le Reich et pour la Prusse.
[Citation dans l'original ►.]
* L'affaire Baralong[55]:
Le 19 aout 1915 le croiseur britannique Baralong
avait coulé un sous-marin allemand. Les marins naufragés avaient ensuite
essuyé des tirs, et périrent. Le 15 janvier 1916, G. Noske
intervient à ce sujet à l'assemblée nationale (cf. ci-dessous).
La
politique vue à travers l'expression artistique:
Sur ses tableaux, George Grosz prend à plusieurs reprises Gustav Noske
comme cible ►.
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Gustav
Noske, intervention à l'assemblée nationale au sujet de l'affaire Baralong, 15 janvier 1916 (extraits)[56]
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[...]
Nous, social-démocrates, avons déjà
dans le passé souligné publiquement que le peuple allemand n'est pas un
peuple de barbares. Nous savons que nos frères sur le champ de bataille ne
se laissent certainement surpasser par les soldats de pays ennemis, en
matière de civilité humaine et sentiment culturel. Eh bien voilà, c'est que
les soldats allemands ne sont pas des descendants d'africains dont les
pères se nourrissaient encore de chair humaine et qui maintenant sont
ramenés contre nous sur le champ de bataille par la France et l'Angleterre
*. Nos soldats, pour la majeure partie, sont originaires de notre milieu,
ils sont passés par notre éducation politique et syndicale, et ils savent
qu'ils mènent cette lutte pour leur patrie, pour leur propre existence et
l'avenir de leurs enfants. [...]
On doit approuver si le gouvernement lui-même cherchera à
obtenir l'expiation pour ce lâche assassinat. Certes, nos amis et moi-même
regrettons tout durcissement ultérieur de la guerre. La guerre est vraiment
déjà assez rude. Mais le peuple allemand ne ressent aucune inclinaison de
mener une politique suicidaire ou de tolérer que l'Angleterre fasse subir
des vilains coups à l'armée allemande et à la marine allemande! On ne peut
pas attendre de nos hommes des sous-marins que nous admirons vivement,
qu'ils s'exposent tranquillement à un lâche assassinat qui les menace de
navires ennemis francs-tireurs et de navires sous un faux pavillon. Je n'ai
pas de motif pour faire des propositions quant à des mesures de
représailles. J'ai la conviction que notre administration de l'armée et de
la marine saura porter les coups de la sévérité requise. Mais nous avons
également la conviction que ce faisant elle saura préserver toujours la
réputation de l'Allemagne comme puissance de culture.
[Citation dans l'original ►.]
* D'autres sources citent cette phrase comme suit (d'après
les Comptes-rendus sténographiques du Reichstag)[57]:
Eh bien voilà, c'est que les soldats allemands ne sont
pas des descendants, pas de fils d'africains qui se nourrissaient de chair
humaine, comme des troupes de couleur qui sont ramenés sur le champ de
bataille par la France et l'Angleterre, pour apporter à l'Allemagne la
culture et la civilisation.
[Citation dans l'original ►.]
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Gustav Noske, intervention à
l'assemblée nationale, 24 octobre 1918 (extraits)[58]
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Les Polonais devraient réaliser que la liberté polonaise
a été payée avec du sang allemand. Selon les arguments de Stychel*
l'Amérique appartient aux Indiens et Wilson devrait émigrer de la Maison
Blanche.
[Citation dans l'original ►.]
* Stychel, Antoni[59]:
à partir de 1898 membre de la Chambre de députés prussienne, à partir de
1904 aussi du Reichstag (Groupe polonaise); participe à l'insurrection
polonaise 1918‑1919.
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Gustav
Noske exhibe son livre d'or
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Après son éviction du devant de la scène politique,
G. Noske s'efforce de façon répétée de mettre en valeur ce qu'il
considère comme ses mérites au service de la patrie. Voici quelques
extraits en ce sens de son livre "Erlebtes aus Aufstieg
und Niedergang einer Demokratie" ("Choses
vécues de l'ascension et du déclin d'une démocratie") publié en 1947[60].
Pour étayer son argumentation, Noske se réfère notamment aux récits
figurant dans le livre de Max von Baden, "Erinnerungen und Dokumente" ("Souvenirs et
documents"), paru en 1927[61].
En début d'octobre, le Commandement suprême de l'armée,
c'est-à-dire Hindenburg, dit que compte tenu de l'état de la situation
"il s'impose de mettre fin au combat [...] Chaque jour qu'on laisse
passer coute la vie à de milliers de vaillants soldats". Jusqu'alors
il n'était jamais question à la commission budgétaire de l'effet d'usure
sur le front allemand exercé par l'agitation. À l'occasion de la prestation
de serment des nouveaux ministres parlementaires l'Empereur dit: "Un
peuple qui a combattu si héroïquement, qui a accompli des actes à tel point
surhumains, sera à tout jamais à l'honneur [...]" Faire la révolution
serait insensé. C'est ce que j'ai souligné dans le dernier discours que
j'ai tenu au Reichstag en tant que député*. Prince Max von
Baden rend compte de ce discours aux pages 490/91 de son livre:
"Noske était plein de critique [...] De façon répétée cependant
transparaissait le sentiment national de cet homme, lorsqu'il dit aux
Polonais: "Selon leurs arguments l'Amérique devrait appartenir aux Indiens",
lorsqu'il protestait contre la spoliation menaçante de nos colonies ou
reprochait au député Haase d'avoir mis de l'huile sur la maison en
flammes." "Mon groupe veut qu'au prolétariat allemand reste
préservé le toit au-dessus de la tête."
Il n'était plus possible de stopper le malheur. De la
flotte, la création chérie de l'Empereur, il prit son départ. Durant les
premières journées de novembre, le soulèvement révolutionnaire s'étendit
sur toute l'Allemagne.
[...]
Plus tard des amiraux et généraux à la retraite m'ont
reproché que je n'aurais pas su arrêter la vague révolutionnaire, moi qui
jusqu'au 6 novembre 1918 ne disposai ni d'un poste ni d'un rang
militaire ni d'une arme; 10 ans plus tard dans des journaux et des
assemblées il pouvait âtre allégué que j'aurais été l'initiateur de la
révolution, qui aurait débutée sous ma direction à Kiel et aurait pu
s'imposer à cause de ma modération calculée judicieusement.
[...]
Ensuite le Prince écrit à la page 584: "Il était
clair, Noske était arrivé au dernier moment pour empêcher à Kiel un chaos
bolchévique. [..] J'ai dû, dit-il au téléphone, accepter le poste d'un
gouverneur et j'ai déjà obtenu des succès valables. En réalité cet homme a
accompli des choses surhumaines." [...] Le gouvernement du Reich décida
(page 588) "mains libres pour Noske dans la tentative d'étouffer
l'éruption locale".
[Citation dans l'original ►.]
* Le 24 octobre 1918. Cf. ci-dessus.
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Le KPD, en modification de sa position antérieure fixant
l'objectif immédiat de la dictature du prolétariat, formule des appels en
faveur de la formation d'un "gouvernement socialiste" (les
21 et 23 mars)[62].
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Le gouvernement décide d'envoyer dans la Ruhr le
ministre de la poste Johannes Giesberts et le ministre
de l'agriculture Otto Braun pour réaffirmer sur place les déclarations
adoptées à Berlin[63].
Il est exclu de négocier avec les communistes.
De son côté, de Münster, le commissaire du Reich et de l'état
pour la Ruhr C. Severing, à l'issu d'entretiens
avec des dirigeants SPD de la région industrielle, déclare qu'il
préconisera vis-à-vis du gouvernement la satisfaction d'une série de
demandes formulées dans une proclamation (cf. ci-dessous)[64]:
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À Stettin (Pommern) (Szczecin,
aujourd'hui en Pologne) le commandant nouvellement nommé du District
militaire 2 [Wehrkreis 2] lieutenant général
Richard von Berendt instaure l'état d'exception
renforcé en Pommern[65].
Les travailleurs répondent en intensifiant la mobilisation pour la grève
générale.
Dans les environs de Greifswald (Pommern),
des volontaires contrerévolutionnaires occupent la centrale électrique
assurant l'approvisionnement d'électricité de la ville[66].
Les travailleurs agricoles ne réussissent pas à les déloger.
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Proclamation transmise par le
commissaire du Reich et de l'état pour la Ruhr Carl Severing
(SPD), 21 mars 1920 (extraits)[67]:
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1. Dès que la situation aura repris son cours
normal, l'état d'exception devra être levé. La levée de l'état d'exception
signifie évidemment la libération de toutes personnes se trouvant en
détention préventive.
2. Amnistie pour tous les délits politiques et
libération de tous les prisonniers politiques, pour autant qu'ils ont
participé à la lutte contre les putschistes de droite.
3. Il est demandé à l'assemblée nationale et au
gouvernement du Reich qu'ils demandent leurs comptes de la façon la plus
rigoureuse, à toutes les personnes qui ont participé au putsch criminel de
Kapp et consorts.
[...]
[Citation dans l'original ►.]
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Réponse ‑ par un
télégramme destiné à être publié ‑ du chancelier G. Bauer
au télégramme que lui avait adressé, la veille, le secrétaire de l'USPD de
Hagen, J. Ernst (cf. ci-dessus)[68]:
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•
|
Au président du comité d'action à Hagen en Westfalen,
Ernst:
Le gouvernement du Reich prend acte avec des
remerciements, que les trois partis socialistes ont fait intervenir toutes
les forces pour l'écrasement de la réaction. Cet objectif a été atteint à
Berlin par l'effondrement du groupe de Kapp. Le désarmement des troupes de
Kapp, dans la région du Ruhr aussi, est mis en oeuvre.
Cependant le général von Watter ne compte pas parmi
les officiers réactionnaires, mais a démontré qu'il se place de la façon la
plus loyale derrière le gouvernement du Reich. La condition préalable est
que le refus de la dictature des conseils ne soit pas simplement promis,
mais qu'il passe dans les actes, qu'en particulier les organes et instances
constitutionnels sur place soient restaurés dans leurs droits et que les
travailleurs déposent les armes. La mise en oeuvre
immédiate de ces mesures est indispensable. Dans le cas contraire le
gouvernement du Reich n'est pas en mesure d'obtenir des vivres de l'Entente
ou de la Hollande, ni d'empêcher l'entrée de troupes de l'Entente. Le mardi
deux ministres du Reich et de Prusse exposeront sur place dans la région le
point de vue du gouvernement.
[Citation dans l'original ►.]
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|
Télégramme adressé par le
général Walther von Watter au chancelier Gustav Bauer[69]:
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•
|
Les ministres du Reich arrivés ici hier, prenant
pleinement connaissance de la situation grave sur place, étaient favorables
à une intervention rigoureuse contre le mouvement communiste, refusaient
toute négociation avec les émeutiers et soulignait que le président du
Reich se plaçait sur le même point de vue. [...] Pour prévenir des
conceptions erronées, il faut signaler d'ici: Ce qui importe, c'est que la
liberté d'action pour le commando du Wehrkreis ne
soit pas limitée, que les armes soient rendues effectivement et pas
seulement déposés, que les prisonniers soient libérés et que soient jetées
les bases pour que des poursuites soient entamées contre les coupables.
Actuellement l'ennemi continue à attaquer. La Reichswehr
lutte jusqu'au dernier homme pour le gouvernement. Prière de rester forts.
[Citation dans l'original ►.]
|
|
•
|
Des dirigeants syndicaux et des représentants du SPD et de
l'USPD se réunissent avec le chancelier pour discuter
des mesures à prendre[70].
C. Legien expose les demandes
suivantes:
1. Négociations avec
les partis bourgeois sur la formation d'un gouvernement purement ouvrier et
2. Épuration des
troupes et de la garde de sécurité et leur retrait des rues de Berlin.
Au terme de la réunion, le chancelier donne les assurances
suivantes:
1. Il interviendra
pour que la Reichswehr soit retiré de Berlin et
qu'uniquement le quartier gouvernemental reste occupé;
2. en outre il
interviendra pour que la garde de sécurité soit complété par des
travailleurs;
3. il négociera avec
la groupe et les groupes bourgeois à l'assemblée nationale au sujet de la
formation d'un gouvernement purement ouvrier;
4. il interviendra
en faveur de la levée de l'état de siège renforcé à Berlin.
[Citation dans l'original ►.]
À l'issue de cette rencontre, les membres du gouvernement
tiennent une réunion pour débattre de l'attitude à adopter par rapport aux
demandes formulées notamment par les syndicats[71].
Les discussions tournent autour des points suivants:
1. Levée de l'état
de siège renforcé;
2. Entrée de
travailleurs dans la garde de sécurité;
3. Retrait des
troupes de Berlin;
4. formation d'un
gouvernement purement ouvrier.
[Citation dans l'original ►.]
Le chancelier considère qu'il faut faire des concessions
importantes, de manière à permettre aux membres du SPD de se séparer des
autres syndicalistes et briser ainsi le front uni. Il préconise d'accepter
les points 1 à 3. Mais cette idée suscite des fortes réserves
liées à la crainte que, une fois ces concessions faites, il ne sera pas
possible de ne pas satisfaire aussi le point 4 (c'est-à-dire, pratiquement,
l'entrée au gouvernement du USPD).
Sur la base de ces échanges successifs, les directions de l'ADGB, de l'Afa-Bund, de la direction locale de Berlin de l'ADGB [Berliner
Gewerkschaftskommission], de l'USPD et du SPD
décident en commun accord de préconiser l'arrêt de la grève générale à
partir du lendemain (cf. ci-dessous)[72].
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|
•
|
Un décret signe par le président Friedrich Ebert (SPD) et le
chancelier G. Bauer déclare la levée des tribunaux d'exception dans la
région Grand-Berlin[73].
Le 25 mars, cette mesure sera étendue à l'ensemble du territoire
national à l'exception des districts Düsseldorf, Arnsberg et Münster ainsi
que la partie ouest de Thüringen. Avec cette restriction, l'état
d'exception renforcé continue dans des larges parties du territoire
national. Le 27 mars, dans le district Grand-Berlin et la province Brandenburg, l'état d'exception renforcé instauré le 19
est transformé en état d'exception simple.
Par décret du président, le premier ministre de Sachsen-Weimar-Eisenach Arnold
Paulssen est nommé commissaire du Reich pour la Thüringen de l'Ouest
[die Länder Sachsen-Weimar-Eisenach, Sachsen-Meiningen,
Sachsen-Gotha, Sachsen-Altenburg, Reuß, Schwarzburg-Rudolstadt,
Schwarzburg-Sondershausen und die von ihnen umschlossenen Gebiete],
et une procédure dite de “Reichsexekution” est
ordonnée, c'est-à-dire un dispositif prévu par la constitution (article
48), qui autorise le président à suspendre temporairement certains droits
fondamentaux et à utiliser la force armée. (Cf. ►.)
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|
•
|
À Hof (Bavière) le gouvernement de Bavière avait
instauré la loi martiale et envoyé dans cette région des formations de
l'armée et des gardes civiles de Chiemgau[74].
Le 22 mars ces troupes occupent la ville et imposent la dissolution de
la garde populaire.
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•
|
Le gouvernement charge Albert Grzesinski
(SPD) de se rendre à Stettin (Pommern)
(Szczecin, aujourd'hui en Pologne) pour entamer des négociations avec les
travailleurs engagés dans la grève générale[75].
Les quartiers ouvriers de la ville ainsi que le chantier naval Vulkan-Werft sont occupés par des troupes gouvernementales. Grzesinski annonce quelques concessions, incluant la levée
de l'état d'exception renforcé à Stettin. Les représentants du SPD et de l'USPD au Comité d'action déclarent que les concessions sont
suffisantes pour recommander aux hommes de confiance des entreprises de
mettre fin à la grève générale; le représentant du KPD se prononce
négativement. Une assemblée des hommes de confiance se tiendra le lendemain
et décidera majoritairement de reprendre le travail le 25 mars.
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Le 15 mars, à Suhl (Thüringen), des troupes de
l'armée avaient tenté à investir la ville, mais avaient dû capituler devant
la contre-attaque des gardes ouvrières [Arbeiterwehren]
de Suhl, Zella-Mehlis, Goldlauter et d'autres
localités des environs[76].
Environ 1500 travailleurs de cette région avancent vers Gotha pour venir en
aide aux forces ouvrières résistant à l'encerclement de cette ville par
l'armée. Le 22 mars, Gotha est libéré.
|
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Résolution de l'ADGB,
de l'Afa-Bund, de la direction locale de Berlin de l'ADGB [Berliner Gewerkschaftskommission], de
l'USPD et du SPD, 22 mars 1920[77]
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•
|
Les comités directeurs de la Fédération syndicale
générale allemande, de l'Union générale libre d'employés, de l'ADGB de Berlin, du Parti social-démocrate d'Allemagne et du
Parti social-démocrate indépendant d'Allemagne, siégeant en commun,
décident:
Après que les
représentants des partis gouvernementaux se sont engagés à intervenir
auprès de leurs groupes à l'assemblée nationale en faveur de la mise en oeuvre des huit revendications syndicales qui résument le
résultat de la grève générale, et que le groupe social-démocrate à
l'assemblée nationale s'est rallié en bloc à ces revendications, tandis que
le comité directeur du Parti social-démocrate indépendant les a reconnues
en tant que revendications minimales;
après qu'en outre le
gouvernement du Reich a formulé la déclaration impérative
1. que les troupes à Berlin seront retirées jusqu'à
la ligne de la Spree,
2. que l'état de siège renforcé sera levée
immédiatement,
3. que les travailleurs armés, en particulier dans
la région du Ruhr, ne devront pas être attaqués,
4. que devra être négocié avec les unions syndicales
sur l'intégration des travailleurs dans les gardes de sécurité en Prusse,
que, sur la base de la reconnaissance de ce programme
syndical et des concessions particulières du gouvernement, ils recommandent
aux travailleurs, employés et fonctionnaires dans tout le Reich, en
particulier à Berlin et environs, de terminer la grève générale au début du
23 mars et reprennent le travail partout. Les syndicats et partis
soussignés s'engagent que, au cas où les revendications de syndicats ne
seraient pas satisfaites et que les engagements du gouvernement seraient
rompus, ils se réuniront de nouveau et décideront de la reprise renouvelée
de la grève générale.
[Citation dans l'original ►.]
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Appel du comité exécutif du
SPD, 22 mars 1920[78]
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Travailleurs! Camarades du parti!
La grève générale a balayé le gouvernement putschiste Kapp-Lüttwitz. Les unions syndicales, avec lesquelles notre
parti a mené la lutte coude à coude, ne se sont pas contentées de cela.
Elles ont décidé la poursuite de la grève générale, jusqu'à ce que soient
obtenus aussi pour l'avenir les assurances nécessaires pour un
développement en liberté, au service du bienêtre du peuple travailleur. Ce
n'est qu'après un parachèvement favorable des négociations menées avec les
partis gouvernementaux le parti et les syndicats ont décidé l'arrêt de la
grève. Cette consigne doit maintenant être suivie totalement.
Cependant, avec l'arrêt de la grève générale notre
travail n'est pas encore accompli. Il ne fait que commencer. Son objectif
est la consolidation de la république. Sous un gouvernement qui est décidé
d'éradiquer totalement les crimes de la réaction, progrès vers le
socialisme sur le terrain de la démocratie. Une pousse énergique vers la
gauche traverse notre parti. Il faut faire table rase sans ménagement, des
erreurs du passé.
Mais nous ne voulons ni nous précipiter vers la folie
d'une dictature des conseils bolchevise ni mener la guerre civile contre
tous les compatriotes qui portent l'uniforme. [...]
[Citation dans l'original ►.]
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•
|
Suite à une invitation adressée par le commissaire du Reich
et de l'état pour la Ruhr C. Severing "aux
conseils exécutifs des villes de Düsseldorf, Duisburg,
Hamborn, Oberhausen, Mülheim, Essen, Gelsenkirchen, Elberfeld, Remscheid,
Barmen, Herne, Recklinghausen, Bochum, Witten, Hagen, Iserlohn, Hörde,
Dortmund, Unna et Hamm, ainsi qu'aux administrations municipales de
ces villes, aux présidents des gouvernements des districts Düsseldorf,
Arnsberg et Münster", s'ouvre à Bielefeld (Nordrhein-Westfalen)
une conférence à laquelle participent des représentants du SPD, de l'USPD, du KPD, du DDP et du Zentrum, de
l'administration, ainsi que le ministre de la poste J. Giesberts et le ministre de l'agriculture O. Braun[79].
Ni les Conseils exécutifs [Vollzugsräte] de la région
industrielle de l'Ouest, dominés par les communistes, ni le commandement de
l'Armée rouge installé à Mülheim ne semblent disposer
d'une représentation. Ces discussions reprennent le fil des décisions
prises par la conférence de la région de Hagen qui s'était tenue le
20 mars avec la participation du SPD, de l'USPD
et du KPD. Les ministres Giesberts et Braun adoptent
la position selon laquelle d'une part il est exclu de négocier avec des
putschistes et que d'autre part les conditions sur lesquelles un
arrangement a été atteint avec les syndicats s'appliquent également dans la
région industrielle tandis que des concessions allant au-delà ne sont pas
concevables. L'USPD et les représentants de l'Armée
rouge exigent une trêve, la dissolution de la Reichswehr
et la mise à l'écart du lieutenant général Oskar von Watter.
À l'issue de la session, il est convenu que l'Armée rouge se
retire vers la rive Sud de la Lippe, tandis que la Reichswehr,
qui attend du renfort venant de Württemberg et Bavière, annonce les
positions de ses formations tout en les maintenant. L'accord est signé
entre autre par un commandant de la partie de Westphalie de l'Armée rouge, Karl Stemmer (USPD), mais par aucun
représentant du commandement du District militaire 6 [Wehrkreis
6].
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•
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L'assemblée générale des conseils d'entreprise
révolutionnaires de Grand-Berlin décide de mettre fin à la grève
générale[80].
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•
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Du 15 au 23 mars, à Nowawes
(aujourd'hui dans Potsdam) (Brandenburg) plus de
4000 travailleurs sont en grève dans 26 entreprises, et à Potsdam
(Brandenburg) plus de 2500 travailleurs dans
109 entreprises[81].
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•
|
À Selb (Bavière) le gouvernement
de Bavière avait instauré la loi martiale[82].
Le 23 mars le corps-franc Chiemgau entre dans la
ville. Les représentants du conseil exécutif [Vollzugsrat]
qui avait été constitué en réaction au putsch Lüttwitz-Kapp
menacent d'un nouveau mouvement de grève et obtiennent le retrait du
corps-franc.
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•
|
Les négociations entamées la veille à Bielefeld se
poursuivent[83].
Elles aboutissent à un accord en 17 points impliquant l'arrêt du
mouvement insurrectionnel dans la région industrielle. Pour l'essentiel,
les arrangements adoptés le 20 mars entre représentants des syndicats
et des partis de gouvernement à Berlin, sont repris et complétés par des
dispositions qui tiennent compte de la situation spécifique dans la région.
Il est convenu que armes et munitions seront remises immédiatement et tous
les prisonniers libérés jusqu'au 27 mars. La Reichswehr
renoncera à entrer dans la région industrielle et l'état exception renforcé
sera levé. Les travailleurs ayant participé aux combats bénéficieront d'une
amnistie.
Parmi les signataires figurent le ministre de la poste J. Giesberts et le commissaire du Reich et de l'état
pour la Ruhr C. Severing, des représentants du
SPD, de l'USPD, du KPD, du DDP et du Zentrum,
de l'ADGB, des syndicats chrétiens, des Associations
de métier Hirsch‑Dunker ainsi que les maires de
Hagen, Recklinghausen et Duisburg. Les officiers du de commandement de
groupe 2 [Gruppenkommando 2] et du District
militaire 6 ayant participé aux négociations ne signent pas l'accord.
Aucun représentant de l'Armée rouge n'avait participé jusqu'au bout aux
négociations.
Deux membres du KPD, Fritz Charpentier
et Oskar Triebel (cf. ci-dessous), signent l'accord,
mais sans être mandatés par leur parti[84].
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•
|
En janvier 1919, O. Triebel avait
participé à l'organisation du mouvement de grève des mineurs dans la région
de la Ruhr. Le 11 janvier il avait signé au nom du KPD l'appel à la
reprise du travail lancé à Essen (cf. ►). En mars
1919 assume la direction du groupe local du KPD à Barmen.
Après avoir signé l'accord de Bielefeld, il sera critiqué par la direction
de district du parti. En 1929 il sera exclu du parti en rapport avec ses
positions concernant la question des syndicats. Il rejoindra le KPD‑Opposition
(KPD‑O ou KPO).
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|
Accord de Bielefeld,
24 mars 1920 (extraits)[86]
|
•
|
Les représentants de tous les partis et groupes
professionnels déclarent qu'ils veulent faire concorder leurs
revendications visant au dénouement de la situation résultant du putsch
Kapp, avec la constitution et le gouvernement, et ceci sur la base de
l'accord suivant:
1. Les représentants des partis gouvernementaux
présents interviendront auprès de leurs groupes à l'assemblée nationale,
qu'en rapport avec la formation imminente d'un gouvernement dans le Reich
et en Prusse, la question des personnes sera résolue par les partis après
concertation avec les organisations syndicales de travailleurs, employés et
fonctionnaires ayant participé à la grève générale, et qu'à ces
organisations sera octroyée une influence décisive sur la réorganisation
des lois en matière d'économie et de politique sociale, tout en préservant
les droits de la représentation du peuple.
2. Désarmement et châtiment immédiat de tous les coupables
en rapport avec le putsch ou le renversement du gouvernement
constitutionnel, ainsi que des fonctionnaires qui se sont mis à disposition
de gouvernements illégaux. [...]
[...]
6. Mise en route immédiate de la socialisation des
branches d'économie mures pour cela, sur la base des résolutions de la
commission de socialisation, à laquelle doivent être associés des
représentants des unions professionnelles. La convocation de la commission
de socialisation est effectuée immédiatement. Prise en charge par le Reich
du syndicat de charbon et celui du Kali.
7. Dissolution de toutes les formations militaires
contrerévolutionnaires qui ne sont pas restées fidèles à la constitution et
leur remplacement par des formations venant des cercles de la population
républicaine fiable, en particulier des travailleurs, employés et
fonctionnaires organisés, sans désavantager un groupe quelconque. [...]
[...]
11. L'ensemble des parties prenantes s'engagent à
exercer toute leur influence afin que les travailleurs retournent sans
exception au travail habituel. Les employeurs sont tenus à reprendre les
travailleurs à leur retour.
12. Est effectuée la remise immédiate des armes et
munitions ainsi que la restitution aux administrations communales, du
matériel de l'armée réquisitionné et capturé.
13. Tous les prisonniers doivent être libérés
immédiatement, au plus tard d'ici au 27 mars, midi à 12 h.
14. Pour autant que cet accord est respecté
loyalement, il n'y aura pas d'entrée de la Reichswehr
dans la région industrielle de Rheinland-Westfalen.
Selon la déclaration du fondé de pouvoir du commandement du Wehrkreis 6
et du commissaire du Reich, le commandement du Wehrkreis
agira dans les affaires politico-militaires uniquement sur instruction
écrite de l'ensemble du ministère de la Reichswehr. En
outre le commissaire du Reich déclare qu'il nommera un homme de confiance
des travailleurs qui devra être entendu en ce qui concerne toutes les
actions politico-militaires au sujet desquelles le commissaire du Reich est
censé participer à la décision.
15. L'état d'exception renforcé sera levé
immédiatement, l'état d'exception général le sera lorsque auront été
effectuées les dispositions spécifiées sous les points 9 à 12.
[...]
Signatures*:
Giesberts, ministre de la poste; Severing; Thielemann; Heinr. Meyer; F. Klupsch; E. Sasse;
Cuno; Stens; Imbusch; Kloft; Hamm; Dr. Jarres; Max Herbrig; Paul;
Oettinghaus; O. Braß; W. Enz; Fritz Charpentier; O. Triebel;
Mehlich, Protokollführer.
[Citation dans l'original ►.]
* Précisions sur les signataires[87]:
SPD: Severing, commissaire du Reich; Thielemann,
Düsseldorf; W. Enz, Barmen; Mehlich, greffier.
USPD: Max Herbrig, Gelsenkirchen; Paul,
Ronsdorf; Oettinghaus, Gevelsberg; O. Braß, Remscheid.
KPD: Fritz Charpentier, Elberfeld; O. Triebel, Barmen.
Zentrum: Giesberts, ministre de la poste; Kloft, Essen; Hamm, maire [Oberbürgermeister],
Recklinghausen.
DVP: Dr. Jarres, maire [Oberbürgermeister],
Duisburg.
DDP: Stens, Hagen.
Syndicats dits libres: Heinrich Meyer, Düsseldorf; F.
Klupsch, Dortmund.
Syndicats Hirsch-Duncker: E. Sasse, Hagen.
Syndicats chrétiens: Imbusch (Zentrum), Essen.
Autres: Cuno, maire [Oberbürgermeister],
Hagen.
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Des unités de l'armée rouge avance vers Wesel (Nordrhein-Westfalen), où sont installées des troupes de la Reichswehr[88].
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Suite au décret du président pour le rétablissement de la
sécurité et de l'ordre publiques [zur Wiederherstellung der öffentlichen
Sicherheit und Ordnung] du 13 janvier 1920 (complété
respectivement le 13 mars par un décret pour la zone de la
Brigade 11 de la Reichswehr, et le 19 mars
par un décret signé par le ministre de la défense H. v. Seeckt et
le ministre de l'intérieur Erich Koch en délégation du président concernant
notamment la zone du commandement de groupe 1 [Gruppenkommando 1],
ordonnant la mise en place de tribunaux extraordinaires et de cours
martiaux), la situation est la suivante[89].
L'état d'exception simple est en vigueur dans tous les territoires du pays
à l'exception de Sachsen, Baden, Württemberg et Bayern; l'état
d'exception renforcé est en vigueur en Prusse de l'Est, de larges parties
de Pommern, dans les districts Schneidemühl,
Brandenburg; des cours martiaux s'y ajoutent dans les
districts Düsseldorf, Arnsberg, Münster et en Thüringen de l'Ouest; des
pouvoirs pour la proclamation de l'état d'exception renforcé ont été
établis pour Schlesien, Mecklenburg,
Schleswig-Holstein, Lübeck, Oldenburg, Sachsen (état et province), Thüringen de l'Est, Anhalt, des parties
de Braunschweig et pour le district Minden.
Des états d'exception particuliers sont en vigueur à Leipzig
et en Bayern.
Le 25 mars le président ordonne en direction des
commandements de groupe 1 et 2, d'annuler les pouvoirs concernant
l'état d'exception renforcé, tandis que les cours martiaux sont maintenus.
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Le gouvernement adresse un appel à la population de Rheinland et Westfalen, dans
lequel il expose les résultats des négociations de Bielefeld et qualifie en
même temps les mouvements de l'armée rouge en direction de Wesel comme
rupture de l'accord[90].
Il exige que les combats cessent immédiatement, qu'il y ait reprise du
travail, et que les armes soient déposées. Le gouvernement fait en sorte
d'adjoindre à l'appel une déclaration de loyauté de la part du lieutenant
général O. v. Watter.
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À Essen (Nordrhein-Westfalen) se
tient une assemblée de délégués des comités d'action [Aktionsausschüsse]
d'environ 70 localités[91].
Les communistes et l'aile gauche de l'USPD forment la
grande majorité. Un conseil central [Zentralrat] est
constitué. Le commandement militaire de Mülheim se
soumet à cette direction politique. Le conseil central considère qu'il n'y
a pas de garantie pour la réalisation de l'accord de Bielefeld, et décide
de proposer au gouvernement de renouer les négociations en vue d'une
prolongation des délais pour la dissolution de l'armée et la formulation de
garanties concernant l'entrée de troupes dans la région de la Ruhr.
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Wilhelm Richter remplace Eugen Ernst comme préfet de
police de Berlin[92].
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Willi Cuno,
maire de Hagen, 25 mars 1920 (extraits)[93]
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Des troupes de travailleurs près de Wesel poursuivent le
combat parce que de ultras à Mülheim, Oberhausen, Hamborn ne reconnaissent pas l'accord. [...] À Dortmund,
grève générale déclarée. [...] Politiquement important de séparer les
Indépendants Bochum, Hagen, Remscheid, prêts à un travail positif, des
communistes à Mülheim, Oberhausen, Hamborn.
[Citation dans l'original ►.]
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Un nouveau gouvernement est formé,
sur la base d'une coalition SPD, DDP, Zentrum.
Pour le SPD y figurent notamment:
Chancelier Hermann Müller,
Ministre de l'économie Robert Schmidt
Ministre du travail Alexander Schlicke
Otto Geßler (DDP) est ministre de la
défense. Parallèlement le colonel Walther Reinhardt est remplacé, en tant
que chef du commandement suprême de l'armée, par H. v. Seeckt. Geßler occupera le poste de ministre de la défense dans tous
les gouvernements successifs jusqu'à être remplacé le 19 janvier 1928
par Wilhelm Groener (sans parti; autrefois commandant
suprême de l'armée, mais il avait abandonné la carrière militaire en septembre
1919). En décembre 1926, suite à la décision du DDP de ne pas participer à
un gouvernement de coalition, Geßler quittera ce parti
pour rester ministre[94].
Le gouvernement dirigé par H. Müller démissionnera le
8 juin 1920, du fait que la coalition des partis qui le compose perdra
la majorité.
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La veille, le chancelier G. Bauer et les membres de
l'ancien gouvernement encore en place avaient décidé de reporter au 29
une décision concernant la suite à donner vis-à-vis de l'armée rouge de la Ruhr[95].
Le nouveau gouvernement dirigé par H. Müller, au cours de sa session
constitutive, décide de formuler un ultimatum exigeant qu'avant le
30 mars à 12 heures, l'autorité constitutionnelle de l'état soit
reconnue, ses organes rétablis, l'armée rouge dissoute, l'ensemble de la
population désarmée et les prisonniers libérés. Dans le cas contraire, les
troupes du lieutenant général O. v. Watter
lanceront une attaque. En outre, Watter ajoute à
l'ultimatum un certain nombre de compléments, impossibles à satisfaire en
pratique.
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Sommation du gouvernement aux
troupes insurrectionnelles dans la région minière de Rheinland-Westfalen,
28 mars 1920[96]
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Par les "négociations de Bielefeld"
le gouvernement a tenté de rétablir le calme et l'ordre dans la région de
la Ruhr, sans emploi de violence. La tentative a échouée. L'armée rouge ne
s'y est conformée. Les attaques contre Wesel ont été continuées avec une
grande véhémence, les prisonniers n'ont pas été libérés, la remise des
armes n'a pas été effectuée, la situation s'est au contraire détériorée.
[...] Cependant, pour donner à tous ceux qui ont été égarés encore une fois
l'occasion de revenir à la raison, le gouvernement veut concéder encore un
dernier délai, avant qu'il n'intervienne par la force des armes. Il exige
donc à l'échéance du 30 mars à midi 12 heures, une sécurité suffisante
pour le commandant militaire du Wehrkreis VI,
lieutenant général v. Watter à Münster, en vue de
l'acceptation et la mise en oeuvre des conditions
suivantes:
1. Reconnaissance sans restrictions de l'autorité d'état
constitutionnelle.
2. Rétablissement des organes d'administration et sécurité
étatiques,, pour autant qu'isl ne sont pas compromis pour avoir pris le
parti du gouvernement Kapp-Lüttwitz.
3. Dissolution immédiate de l'Armée rouge.
4. Désarmement totale de l'ensemble de la population, y compris
les gardes civiles, sous surveillance des organes étatiques légaux. - La
façon et le moment de la mise en oeuvre du désarmement
seront fixés plus en détail par le détenteur du pouvoir exécutif.
5. Libération immédiate des prisonniers.
Si ces conditions sont acceptées, le gouvernement du
Reich renoncera à une attaque, dans le cas contraire est accordé au
détenteur du pouvoir exécutif la liberté d'action pour le rétablissement
intégral d'une situation conforme à la légalité.
[Citation dans l'original ►.]
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Avant même l'expiration de l'ultimatum gouvernemental, les
troupes du lieutenant général O. v. Watter
entrent dans la région du Ruhr[97].
Les combats dureront jusqu'au 6 avril.
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À Dortmund (Nordrhein-Westfalen),
une assemblée de conseils d'ouvriers élit un nouveau conseil exécutif [Vollzugsrat][98].
Il est présidé par Adolf Meinberg qui avait rejoint le
KPD avec une partie de l'USPD au printemps 1919[99].
Il avait été emprisonné à Dortmund depuis septembre 1919 et avait été
libéré par des manifestants, le 13 mars.
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En Prusse est constitué un gouvernement [Staatsministeriums] avec Otto Braun (SPD) comme premier
ministre [Ministerpräsident], avec des ministres du
SPD, du DDP et du Zentrum. Braun occupera ce poste
jusqu'au 26 avril 1932, avec deux exceptions: du 21 avril au
7 novembre 1921 sera en place un gouvernement formé par le Zentrum et le DDP, puis du 18 février au 4 avril
1925 un gouvernement formé par Zentrum et SPD. Le
poste de ministre de l'Intérieur dans ces gouvernements successifs sera
occupé par Carl Severing (SPD), à l'exception de
l'intervalle du 7 octobre 1926 au 21 octobre 1930, où il sera
remplacé d'abord par Albert Grzesinski (SPD) jusqu'au
27 février 1930 puis par Heinrich Waentig (SPD). Severing sera par ailleurs ministre de l'Intérieur dans le
gouvernement en place du 28 juin 1928 au 27 mars 1930. La
situation changera notablement à partir de la démission, le 26 avril
1932, du gouvernement de l'époque, dirigé encore par O. Braun.
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À Dortmund (Nordrhein-Westfalen),
des corps-francs bavarois intervenant dans la Ruhr appréhendent le
président du conseil exécutif, A. Meinberg, mais
il réussit à s'échapper[100].
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